Examen des résultats


10    Examen des résultats

Dans le présent chapitre, nous traitons des grandes constatations de l’étude en deux volets. Nous comparons d’abord nos résultats avec ceux d’autres études similaires pour ensuite comparer les constatations tirées des sondages aux bilans des groupes de discussion.

Nous nous appuyons par ailleurs sur les définitions du caractère des deux systèmes à l’étude qui ressortent des travaux de recherche menés dans ces domaines.

Pour le système scolaire, nous avons examiné les constatations à la lumière des travaux de recherche parus comme ceux de Michael Fullan, un spécialiste de la réforme éducationnelle, et ceux de Shannon et McCall Consulting, qui ont analysé le rôle des systèmes scolaires dans la prévention de l’infertilité pour le compte de la Commission royale sur les nouvelles techniques de reproduction. En ce qui concerne le système de santé publique, nous nous sommes fondés sur les derniers travaux effectués par l’Organisation mondiale de la santé sur le rôle des centres de santé des régions et des localités de même que sur les travaux antérieurs de l’Association canadienne de santé publique et de l’Association canadienne pour l’éducation à la santé afin de comprendre le rôle que pourrait assumer le système de santé publique et d’en déterminer le fonctionnement.

Nous avons également examiné les études de Green sur la diffusion, qui offrent certains conseils quant au processus à suivre pour amorcer des changements dans les systèmes de la fonction publique Ces travaux coïncident avec la base de connaissances sur la réforme éducationnelle. Nous avons par ailleurs étudié certains résultats de recherche sur le sida et la sexualité, par exemple, ceux de Mauro, qui a analysé l’incidence des programmes obligatoires d’éducation sexuelle aux États-Unis. Ces sources d’information forment notre base de discussion sur les processus de diffusion et d’instauration des politiques, où nous voyons que des politiques réalistes donnent lieu à des programmes efficaces, qui donnent à leur tour lieu à des pratiques soutenues.

Le chapitre se divise comme suit : sommaire et constatations, comparaisons et, enfin, conséquences et conclusions.

Nous résumons en premier lieu les constatations découlant des entrevues et des questionnaires auxquels s’est soumis le personnel de l’éducation et de la santé publique. La présentation suit le même ordre que celui du rapport. Nous formulons quelques observations d’ordre général avant d’aborder les questions de l’élaboration des politiques, des programmes d’études et de l’enseignement, des services préventifs en santé sexuelle, du soutien social puis du milieu physique sain où règne la sécurité.

Nous comparons ensuite les résultats des séances de discussion tenues avec les élèves et les parents. Encore une fois, nous présentons un aperçu des données disponibles et les examinons en regard d’autres constatations. Nous voyons ensuite comment ces constatations viennent se rattacher aux critères d’efficacité signalés au début des diverses sections du présent rapport. Nous comparons ensuite nos grandes conclusions avec les résultats d’études et de travaux de recherche connexes.

Pour terminer, nous nommons les principales conséquences et tirons certaines conclusions d’ordre général. Nous formulons enfin quelques suggestions en ce qui concerne la ligne à suivre en matière de politique.

Observations générales

On peut tirer trois grandes observations à partir des constatations découlant de la présente étude.

Premièrement, le nombre d’activités noté antérieurement en matière de prévention du VIH et des MTS et de promotion de la santé sexuelle a chuté dans les deux systèmes. Deuxièmement, des écarts se dessinent au sein des deux systèmes et entre eux, ces derniers étant en pleine période de transition. Troisièmement, les gouvernements de tous les paliers et de toutes les instances du Canada adoptent des rôles davantage tournés vers l’évaluation et l’élaboration des politiques. Ils n’entreprennent cependant pas suffisamment de surveillance et d’évaluation. Et encore, l’élaboration des politiques se fait sans égard aux ressources et au processus d’instauration.

1. S’est affaibli le niveau d’activité observé antérieurement dans les systèmes scolaire et de santé publique. On note peu d’exemples de campagnes soutenues de sensibilisation de la population. Dans les programmes d’études, les instances ont réduit le temps alloué à l’éducation sexuelle dans les écoles parce qu’elles ont combiné l’éducation sexuelle soit avec l’information sur les carrières soit avec l’éducation physique. On a restreint les services du personnel infirmier de la santé publique dans les écoles, réduisant du coup la quantité et la qualité des services préventifs offerts aux adolescentes et adolescents en matière de santé sexuelle dans un endroit facile d’accès pour eux, en l’occurrence l’école.

Les séances de discussion avec les élèves et les parents font ressortir que les adultes et les jeunes à la fois savent que, même si le parent s’avère la première source d’éducation sexuelle, les discussions familiales ne peuvent pas toujours couvrir toutes les questions de santé sexuelle. Les élèves reconnaissent qu’ils peuvent obtenir d’une multitude de sources de l’information sur la sexualité, notamment sur le VIH/sida et les MTS, mais estiment que l’école est la source la plus fiable et la plus objective à cet égard.

Les parents ayant participé aux séances de discussion tenues dans le cadre de l’étude sont d’avis que l’éducation sexuelle et les services préventifs en santé sexuelle sont essentiels pour les adolescentes et adolescents. Ils veulent qu’on débute l’éducation sexuelle à un plus jeune âge, qu’on étende les cours sur un plus grand nombre d’années au secondaire et qu’on approfondisse davantage la matière. Les parents pensent également que les services de santé sexuelle fournis aux jeunes ne sont pas facilement accessibles, en fait pas dans un endroit commode pour cet auditoire, même si les jeunes en connaissent l’existence.

Casper (1990) indique que l’influence parentale à elle seule ne suffit pas à retarder chez les jeunes les premiers rapports sexuels ni à garantir une grossesse ou un accouchement sans risques. Ses travaux parmi d’autres laissent sous-entendre que les parents et les cours peuvent tout de même avoir un effet sur l’utilisation de contraceptifs et sur la nature des relations entretenues par les jeunes tout au long de leur adolescence et au moment de leurs premières activités sexuelles.

Une étude publiée récemment par la société DUREX (Mallet, 1998) montre que les jeunes Canadiennes et Canadiens ont leurs premiers rapports sexuels plus tôt que les jeunes de la plupart des autres pays. La moyenne d’âge mondiale atteint 17,6 ans tandis qu’au Canada, la moyenne est de 16,6 ans. Il n’est donc pas surprenant que nous ayons constaté un appui énergique envers la mise en œuvre de programmes d’éducation sexuelle dès l’âge de 10 ans chez plus de la moitié des Canadiennes et Canadiens.

Les travaux de recherche sur la réforme éducationnelle (Fullan, 1991; Hord et al., 1988) et sur la diffusion des programmes et des mécanismes de promotion de la santé (Ferrence, 1996; Green et Johnson, 1996) laissent supposer que des efforts continus et soutenus s’avèrent essentiels si on veut assurer le maintien et la qualité des programmes et des activités novatrices, comme l’éducation sexuelle ou les services en santé sexuelle pour les jeunes. Cela importe d’autant plus pour des thèmes controversés comme la prévention du VIH, où bien des influences agissent sur les mises en œuvre (Shannon et McCall, 1993) et où les idées novatrices doivent d’abord passer par plusieurs paliers du système (Leithwood et al., 1991).

Dans leurs séances de discussion avec le personnel enseignant de la Nouvelle-Écosse, Beazley et al. (1996) ont découvert que, la plupart du temps, les arrondissements scolaires et les directions d’école appuient l’éducation sexuelle en théorie mais beaucoup moins en pratique.

Conséquences

En conséquence, nous déclarons qu’il faut soutenir l’instauration et le maintien des programmes d’éducation sexuelle et des services préventifs en santé sexuelle si on veut réaliser les objectifs éducationnels avec des programmes permanents et des méthodes professionnelles.

2. Les systèmes scolaires et les systèmes de santé publique dans les provinces et territoires du Canada connaissent des temps de grands changements. On voit apparaître des écarts dans les deux systèmes et dans la coordination entre les deux systèmes en ce qui concerne la promotion de la santé sexuelle et la prévention du VIH et des MTS. Il s’est fait un nombre impressionnant d’amalgamations tant dans le système scolaire que dans celui de la santé publique. Par exemple, au cours des dernières années, le nombre d’arrondissements scolaires au pays est passé d’environ 1100 à un peu plus de 600. Des coupures similaires se sont faites dans les services de santé publique de plusieurs instances. De même, toujours dans les deux systèmes, les gouvernements ont instauré des politiques visant à décentraliser la prise de décision et la responsabilité en faveur des collectivités. Ce phénomène semble prendre place sans véritable cohésion ni consensus au sujet des objectifs visés à long terme avec la politique de promotion de la santé sexuelle, sans mécanismes appropriés pour favoriser la communication et la coordination et sans un engagement ferme envers le perfectionnement du personnel. Un tiers des répondantes et répondants des ministères, des arrondissements scolaires et des services de santé publique rapportent que leur poste est sous évaluation. On sabre également dans d’autres ressources humaines et financières sans assurer pour les organismes et les spécialistes une meilleure liaison avec les ressources disponibles dans la collectivité.

On peut définir les systèmes scolaires et de santé publique comme étant des systèmes bureaucratiques et fonctionnant déjà de façon relativement indépendante. En d’autres mots, les gouvernements et les autorités décisionnelles ne sont pas en mesure de simplement aiguiller ou diriger les spécialistes de première ligne et les organismes locaux.

Dans notre introduction, nous avons présenté les étapes et les processus essentiels à l’instauration des politiques d’éducation sexuelle dans les systèmes scolaires (Shannon et McCall, 1993). Ces étapes s’appliquent aussi bien aux systèmes de santé publique.

Les travaux de recherche effectués sur ces types de système (Weick, 1982; Muller, 1997; Knip et VanderRegt, 1990; Hord et al., 1992; Leithwood et al., 1995) indiquent clairement que les autorités décisionnelles doivent avoir recours aux stratégies suivantes pour promouvoir et soutenir efficacement les améliorations :

  • les autorités des systèmes doivent établir et maintenir un consensus sur les objectifs en matière de politique;
  • il faut soutenir la coopération et la communication à tous les paliers;
  • le perfectionnement professionnel doit se faire de manière continue afin de permettre au personnel d’assumer de multiples fonctions.

Les constatations de la présente étude s’apparentent à celles d’autres études et travaux de recherche sur le transfert des pouvoirs et la restructuration ayant lieu dans les systèmes scolaire et de la santé publique dans d’autres instances.

Dans leur examen des politiques et des programmes d’éducation sexuelle de quatre provinces du Canada, Ajzenstat et Gentles (1988) ont trouvé que, sauf pour la Saskatchewan, les programmes d’éducation sexuelle se sont organisés localement dans les années 1970 et 1980. Vers la fin des années 1980, le processus a toutefois évolué en même temps que les ministères de l’Éducation peaufinaient, mettaient à jour et rendaient obligatoire l’éducation sexuelle en raison de la menace du VIH. De nos jours, toutes les provinces et les deux territoires rendent obligatoires les cours d’éducation sexuelle ou sur le VIH, ou les deux.

L’Organisation mondiale de la santé (1997) note, après avoir étudié le rôle, à l’échelle locale, des centres de santé communautaires dans divers pays du monde, que les autorités de la santé transféraient les responsabilités à ces centres locaux en exigeant d’eux de jouer un rôle plus important dans le développement communautaire. À ce chapitre, elle cite en exemple le modèle des CLSC au Québec. Les auteurs du rapport en question exhortent toutefois à l’élargissement des programmes de perfectionnement du personnel œuvrant en santé publique afin de donner à celui-ci les outils nécessaires pour assumer plus adéquatement le nouveau rôle de développement communautaire qu’a amené la décentralisation.

Muller et Pollard (1994) montrent à quel point il importe de renforcer les rapports entre les systèmes scolaires, de la santé et autres si on veut assurer des décisions judicieuses dans le monde décentralisé d’aujourd’hui. Leur rapport sur le projet «Arkansas Family First» met en lumière l’utilisation des centres de la famille et des jeunes comme carrefour en matière de prestation de services et de coordination de programmes. Un peu comme le rapport de l’Organisation mondiale de la santé (1997), ce rapport suggère qu’on devrait donner au centre de santé communautaire (clinique) le rôle de carrefour pour ce qui est des activités et de la coordination intersectorielles. Par le passé toutefois et d’après les constatations de la présente étude, on perçoit depuis longtemps la clinique locale surtout comme un mécanisme de prestation de première ligne pour les services cliniques.

Conséquences

En conséquence, nous suggérons de donner au système de santé publique le rôle, les ressources et la formation professionnelle requises pour lui permettre de coordonner la prestation des programmes de santé sexuelle à l’intention des adolescentes et adolescents. En outre, nous proposons de renforcer les liens entre les écoles et les centres de santé communautaires.

3. Les ministères de l’Éducation et de la Santé ont modifié leur rôle ces dernières années de manière à mettre plus d’emphase sur la coordination et le contrôle des politiques. Les constatations découlant de la présente étude montrent toutefois que les deux systèmes effectuent très peu de surveillance et d’évaluation des programmes et des services pour ce qui est de la promotion de la santé sexuelle et de la prévention du VIH et des MTS. Par exemple, les autorités du milieu de l’éducation ne surveillent pas les acquis des élèves dans les cours d’éducation et de santé sexuelles; les autorités du milieu de la santé ne suivent pas les connaissances, les attitudes et les comportements des jeunes en matière de sexualité; on n’évalue pas périodiquement le degré de sensibilisation de la population à l’égard des questions de santé sexuelle et on ne prend pas souvent note des programmes et des pratiques des arrondissements scolaires, des services de santé publique et des spécialistes de première ligne.

Si les autorités décisionnelles veulent connaître les répercussions de leurs décisions, ils ont besoin de rapports périodiques, fiables et comparatifs sur le contexte, les intrants, les processus et les résultats se rattachant à leurs systèmes.

Les résultats de l’étude pancandienne que nous avons menée montrent que les autorités décisionnelles ne produisent ni n’examinent ce genre de rapport, même s’ils peuvent aisément obtenir les données.

D’autres systèmes, comme ceux en place aux États-Unis, semblent commander de plus en plus régulièrement des rapport systémiques sur la santé des jeunes et sur la performance des systèmes scolaires et des systèmes de santé publique. Par exemple, les Centers for Disease Control ont mis au point un Youth Risk Behaviour System (système de comportement à risque chez les jeunes) [Kann et al., 1995) par lequel on suit à la trace la sexualité comme étant l’un des six problèmes de santé auxquels se heurtent la jeunesse d’aujourd’hui. Les systèmes de l’éducation et de la santé en sont maintenant à collecter des données pour la deuxième édition de la School Health Policies and Programs Study (étude sur les politiques et les programmes de santé en milieu scolaire) [Kolbe et al., 1995], une étude dans le cadre de laquelle on collecte des données sur le VIH et la sexualité. On évalue la performance des systèmes de santé publique aux États-Unis en les comparant aux normes nationales (Turnock et al., 1994). Le National Education Goals Panel (le groupe d’experts sur les objectifs éducationnels nationaux) [NEGP, 1998] publie périodiquement des rapports sur deux objectifs nationaux liés à la santé des élèves.

Conséquences

En conséquence, il y a un besoin urgent d’instaurer tant dans les systèmes scolaires que dans les systèmes de la santé publique des mécanismes qui permettraient de mieux surveiller la promotion de la santé sexuelle et la prévention du VIH et des MTS puis d’en faire rapport. Nous proposons que le CMEC et Santé Canada s’appuient sur le modèle de la présente étude pour élaborer une stratégie de collaboration permanente afin de faire le suivi des politiques et des programmes de santé en milieu scolaire au Canada. Nous suggérons par ailleurs d’apparenter le plus possible ces nouveaux mécanismes à ceux d’autres pays (comme les États-Unis) et des membres de l’Organisation de développement et de coopération économiques de manière à faciliter les pourparlers internationaux.

Élaboration, instauration et évaluation des politiques

4. Les résultats de la présente étude montrent que les systèmes scolaires et de santé publique ne suivent pas un cycle approprié pour l’élaboration des politiques sur la promotion de la santé sexuelle et la prévention du VIH et des MTS. Un cycle adéquat comprendrait l’énonciation et la précision des problèmes, la consultation ainsi que l’adoption, l’instauration et l’évaluation de la politique. À la fin des années 1980, on a déployé considérablement d’énergie pour l’élaboration des politiques sur le sida et la sexualité. Nous avons cependant découvert qu’on ne procède pas à l’évaluation périodique du processus d’instauration ni de l’incidence des politiques et des programmes y afférents.

L’élaboration des politiques se veut cyclique pour être efficace (Burian, 1989; Association canadienne pour l’éducation à la santé, 1996; King et Muethen, sans date; Wallatt et Piazza, 1991; Downey, 1979). Il faut prévoir dans le processus d’adoption de la politique un mécanisme de communication des résultats ainsi qu’un calendrier de mise en œuvre.

Conséquences

En conséquence, nous proposons que les responsables de l’élaboration des politiques des systèmes scolaires et de santé publique passent en revue le contenu de leurs politiques et les processus se rapportant à la prévention du VIH et des MTS et à la promotion de la santé sexuelle. Ils doivent porter une attention particulière à l’évolution des problèmes liés au VIH et à la sexualité depuis l’adoption des politiques. Ils doivent également évaluer l’incidence et l’efficacité des politiques et des programmes en place, s’enquérir de l’opinion des parties concernées puis établir les mécanismes nécessaires pour communiquer plus systématiquement les progrès accomplis.

5. Les répondantes et répondants des systèmes scolaires et de santé publique ne saisissent pas bien les objectifs visés à long terme avec les politiques de promotion de la santé sexuelle. Moins de la moitié, aux trois paliers, sont au courant des objectifs mentionnés dans la politique officielle d’éducation sexuelle. Quant à la prévention du VIH, les objectifs à long terme semblent plus explicites et mieux compris par les personnes interrogées dans le milieu de la santé publique. On se réfère souvent au programme pédagogique sur la sexualité et la santé pour connaître l’orientation à suivre dans le milieu de l’éducation. Cependant, les résultats de notre étude montrent que les documents se rapportant au programme d’études en question ne répondent peut-être pas aux principales attentes prévues dans les politiques. Dans quelle mesure? Quand évaluera-t-on le programme scolaire? Comment?

Les réponses des parents participant aux séances de discussion reflètent l’ambiguïté des objectifs à long terme dans les politiques des deux systèmes. Les parents font savoir qu’ils ne sont pas adéquatement informés du contenu des programmes d’éducation sexuelle. Ils ne savent pas non plus comment ni où les services de santé sexuelle sont offerts aux adolescentes et adolescents dans la collectivité.

Le premier critère de qualité qui ressort de la présente étude en ce qui concerne l’élaboration des politiques est que le personnel et les personnes participantes de tout système de service public doivent parfaitement comprendre les attentes (Santé Canada, 1994; Association canadienne des administratrices et administrateurs scolaires, 1992; Association canadienne de santé publique, 1993). Il importe par ailleurs de faire correspondre l’orientation aux ressources disponibles (humaines et financières). À la National School Boards Association des États-Unis (1981), on estime que la valeur repose sur la création d’une structure à l’intérieur de laquelle le personnel visé peut exécuter ses tâches. Les politiques étoffées énoncent les résultats escomptés, les justifications et les attentes des stratèges ainsi que le calendrier de mise en œuvre et les mécanismes d’évaluation et de communication des progrès.

Une étude menée par l’Association canadienne des commissions et conseils scolaire (1988) montre que la plupart des politiques mises de l’avant par les ministères de l’Éducation ne prévoient pas la portée, les délais ni les mécanismes prévus pour l’évaluation des politiques. Nous avons dû tirer de plusieurs exemples de divers arrondissements scolaires un modèle de politique sur le sida qu’avait mis au point l’Association canadienne des administratrices et administrateurs scolaires (1992) parce qu’aucun exemple ne donnait une définition précise de toutes les attentes énoncées dans la politique.

Aux États-Unis, la School Health Policies and Programs Study (Small et al., 1995) indique que 77,2 p. 100 des écoles secondaires de premier et de second cycles ont en place des politiques sur le VIH/sida. Elle montre par ailleurs que 65,9 p. 100 des directions d’école suivent les lignes directrices ministérielles. En fait, seulement 54,5 p. 100 des ministères de l’Éducation déclarent avoir émis une politique officielle sur le VIH/sida.

Bien des études de cas font ressortir la valeur des cours de sexualité dans les écoles, des programmes d’entraide, des services préventifs de santé dispensés aux jeunes des écoles et de la participation des parents. Il n’existe toutefois aucune compilation des connaissances sur le niveau de service ou de programmation minimum ni sur les normes de prestation de ces programmes dans les écoles. Santé Canada a établi des normes générales pour l’éducation sexuelle (Santé Canada, 1994) et pour les services préventifs en santé sexuelle (Santé Canada, 1998), mais personne ne les a appliquées au milieu scolaire ni directement à la jeunesse.

Conséquences

En conséquence, nous concluons qu’il faut effectuer de plus amples recherches sur les politiques afin d’arriver à établir des attentes réalistes et réalisables en matière de promotion de la santé qui permettraient de prévenir le VIH et les MTS et de promouvoir la santé sexuelle dans les écoles. La recherche devrait viser à définir ce qui suit :

  • les notions, les croyances et les habitudes à enseigner en matière de santé sexuelle;
  • le niveau minimum de services préventifs en santé sexuelle qu’on devrait offrir à la jeunesse dans les écoles ou à proximité;
  • le soutien social qui risque de découler d’un travail étroit avec des groupes d’élèves, les parents et les organismes communautaires;
  • les normes minimales à établir si on veut créer un milieu scolaire sain empreint de sécurité, y compris les précautions hygiéniques et la prévention du harcèlement ou de la discrimination.

6. La plupart des systèmes scolaires et de santé publique n’ont aucun plan d’action à long terme sur la promotion de la santé sexuelle ou sur la prévention des MTS. En effet, moins de la moitié des répondantes et répondants de tous les paliers de ces systèmes affirment disposer de tels plans d’action. Les trois quarts des ministères de la Santé déclarent avoir en place un plan d’action sur la prévention du VIH contre seulement 56 p. 100 des services de santé publique et 42,8 p. 100 des infirmières et infirmiers de santé publique.

Cette constation ne reflète en aucun point le second critère de qualité énoncé concernant l’élaboration des politiques, c’est-à-dire que des plans d’action explicites devraient guider le personnel de tous les paliers des systèmes (Crighton, 1987; Odden, 1991; Roper et al., 1992, OMS, 1992; Association canadienne de santé publique, 1992).

Les résultats de la présente étude s’apparentent à ceux d’autres études effectuées sur la mise en œuvre de programmes d’éducation sexuelle. En outre, les derniers travaux de recherche sur le rôle du système de santé publique dans la promotion de la santé ou la prévention du VIH semblent indiquer une désorganisation à tous les paliers.

Une étude menée aux États-Unis (Muraskin, 1986) laisse supposer que l’énonciation ou la prescription des résultats d’apprentissage en matière d’éducation sexuelle ne suffit pas à garantir l’application voulue. Le ministère de l’Éducation de la Saskatchewan (1996) a commandé une étude sur l’exécution de leur programme d’éducation pour la santé destiné aux élèves des 7e à la 9e années. Il en est ressorti que la réalisation s’avère difficile pour les raisons suivantes :

  • la longueur et la complexité de la partie du programme qui comprend un «modèle d’action sanitaire» se rapportant aux connaissances et aux comportements;
  • l’absence d’aide pour la mise en place et la poursuite du programme;
  • la mauvaise formation du personnel enseignant;
  • le manque de familiarité du personnel enseignant avec les méthodes d’enseignement et les stratégies d’évaluation des élèves suggérées;
  • les problèmes auxquels se heurte en classe le personnel enseignant devant les questions délicates;
  • le manque d’appui de la part de l’administration;
  • la difficulté à trouver du matériel pédagogique et didactique adéquat.

Les travaux de recherche sur la réussite ou le fiasco des nouveautés dans le milieu de l’éducation (Fullan, 1991; Hord et al., 1988; Adams, 1988) confirment ces constatations et le besoin de mettre de l’avant des plans de mise en œuvre et de diffusion appropriés.

Outre ces fréquents problèmes, il existe probablement d’autres obstacles à la prévention du VIH et des MTS et à la promotion de la santé sexuelle auprès des jeunes et en milieu scolaire. Mentionnons par exemple la confusion et l’état de crise qui prévalent à l’heure actuelle par rapport au rôle des systèmes de santé publique.

En 1993, l’Association canadienne de santé publique (1993) a publié un rapport sur le rôle de la santé publique dans la prévention du VIH. Une des conclusions du rapport portait sur le fait qu’on devrait clarifier et promouvoir le rôle de la santé publique en ce qui concerne le VIH et le sida. Turnock et al. (1994) abondent dans le même sens en rapportant l’absence de consensus dans le milieu de la santé publique aux États-Unis pour ce qui est des objectifs et du caractère des mécanismes organisationnels. Ils indiquent également que moins de 40 p. 100 des ministères de la Santé publique de ce pays tenaient sérieusement compte des fonctions de base ressortant d’une étude. Nevell (1989) mentionne que les services de santé publique ne disposent ni des ressources humaines ni des ressources financières suffisantes pour accomplir leurs tâches.

À l’échelon provincial, Chambers et al. (1994) ont comparé le rôle joué présentement par les infirmières et infirmiers de santé publique en Ontario par rapport aux attentes officiellement établies par l’Association canadienne de santé publique. Ils notent que le corps infirmier exerce souvent un rôle d’éducation et de conseils, de marketing social et d’animation, mais beaucoup moins souvent de développement communautaire, d’élaboration des politiques, de recherche et de planification des ressources. Notre étude montre que ces personnes se trouvent devant d’autres diminutions de leur action en matière d’éducation, de marketing social et à d’animation.

Conséquences

En conséquence, nous proposons d’envisager la possibilité d’effectuer d’autres recherches sur la rentabilité des services préventifs de santé dans les écoles ou à proximité. Un tel exercice devrait comprendre les rôles multiples que peut assumer la santé publique dans les systèmes scolaires, notamment en ce qui regarde la recherche sur les besoins en santé dans la collectivité, les rôles d’éducateurs et d’experts-conseils en matière de programmes, la facilitation de l’accès aux services de santé, le travail avec les parents, la revendication pour l’établissement de politiques ainsi que le suivi des résultats.

8. Les politiques actuelles ne contiennent pas de normes minimum assez claires relativement à l’éducation sexuelle. Les ministères de l’Éducation rendent presque toujours obligatoires l’éducation pour la santé, l’éducation sexuelle et l’éducation sur le VIH mais effectuent rarement un suivi, d’après les personnes interrogées dans les arrondissements scolaires et les écoles. Par exemple, tous les ministères de l’Éducation exigent que soient donnés des cours d’éducation pour la santé jusqu’à la fin du premier cycle du secondaire. Cependant, seulement 75 p. 100 des arrondissements scolaires et 60 p. 100 des directions d’école rapportent que ces cours sont obligatoires dans leurs écoles. De même, environ les trois quarts des ministères de l’Éducation prescrivent des cours d’éducation sexuelle au premier cycle du secondaire. Cette proportion diminue à presque les deux tiers à l’échelon des arrondissements scolaires. Moins de 40 p. 100 des directions d’école prescrivent les cours d’éducation sexuelle entre la 7e et la 9e années. Les ministères de l’Éducation ne s’intéressent pas au rendement des élèves dans les cours d’éducation pour la santé, même si les écoles en font rapport comme pour toutes les autres matières.

Et encore, environ la moitié (54,5 p. 100) des ministères de l’Éducation font savoir qu’ils prescrivent ou recommandent une période de temps minimum pour les cours d’éducation sexuelle. Le temps recommandé, ou qu’on nous a rapporté, est de 8,3 heures pour l’éducation sexuelle contre de 45 à 50 heures pour l’éducation pour la santé. La majorité des répondantes et répondants des arrondissements scolaires et des directions d’école disent respecter cette prescription. Nous avons toutefois vite remarqué que la plupart ne connaissent même pas le nombre d’heures recommandé. Le personnel enseignant mentionne qu’il donne entre trois et huit heures de cours d’éducation sexuelle par année, selon le niveau scolaire.

Les séances de discussion avec les parents et les élèves font ressortir les mêmes constatations. On estime que l’éducation sexuelle devrait couvrir davantage de matière, commencer plus tôt et se poursuivre au second cycle du secondaire, au moment où les élèves risquent de prendre des décisions quant à leurs activités sexuelles. En Nouvelle-Écosse et en Colombie-Britannique, les parents des groupes de discussion estiment qu’on devrait accorder plus de temps à l’éducation sexuelle dans le programme d’études.

Il ressort nettement des travaux de recherche menés sur l’élaboration des politiques qu’on devrait inclure des normes minimum relativement aux attentes, de manière à orienter l’exécution des programmes et la pratique professionnelle (Association canadienne des administratrices et des administrateurs scolaires, 1992; National School Boards Association, 1981; Crighton, 1981). Même si les études sur l’éducation sexuelle n’indiquent pas clairement le temps minimum à consacrer en salle classe, les études de cas sur la question font état de plus de 10 heures par année.

Une étude accomplie pour le compte du Conseil des ministres de l’Éducation (Canada) (King et Warren, 1996) montre qu’un programme pédagogique de 26 heures, intitulé Compétences pour des relations saines, réussit à influencer les intentions des élèves de la 9e année par rapport à leurs comportements sexuels. Toutefois, sans la poursuite des cours dans les années suivantes, le programme en question n’influence plus le retardement des premières activités sexuelles.

Il faut par ailleurs revoir les travaux de recherche sur les effets immédiats de l’éducation sexuelle. Certaines études laissent supposer que les jeunes commenceront leurs activités sexuelles à l’adolescence, sans égard à l’éducation sexuelle ou à l’influence parentale. La question serait de savoir si l’éducation sexuelle influence le degré de risque avec lequel composent les jeunes en devenant sexuellement actifs de même que la nature de la relation qu’ils entretiennent avec leur partenaire sexuel.

D’autres études font état de la difficulté à assurer le respect des prescriptions et à accorder le temps voulu dans l’horaire scolaire. En Colombie-Britannique, dans une étude qualitative sur la mise en œuvre du Family Life Education Program, Friesen et al. (1988) mentionnent en effet que la difficulté à trouver une place dans l’horaire est le premier problème soulevé par les administrations scolaires au sujet de l’instauration des nouveaux programmes.

Dans un sondage effectué auprès de 245 arrondissements scolaires de quatre provinces canadiennes, Ajzensat et Gentles (1988) ont constaté que 57 p. 100 des arrondissements avaient publié des lignes directrices concernant l’éducation sexuelle, comparativement aux 21 p. 100 obtenus lors d’une étude similaire menée en 1977 par l’Association canadienne d’éducation. Le tableau 223 donne le nombre d’heures de cours d’éducation pour la santé et d’éducation sexuelle rapporté en moyenne.

Tableau 223

Nombre d’heures de cours consacré à l’éducation sexuelle 7e et 8e années 9e et 10e années 11e et 12e années
Colombie-Britannique 13 14 13
Saskatchewan 26 27 34
Ontario (écoles publiques) 9 13 13
Ontario (écoles séparées) 20 43 47
Nouvelle-Écosse 30 et plus 26 et plus 40 et plus

Après avoir examiné les programmes d’études des ministères de l’Éducation au Canada, Barrett (1994) constate que l’éducation sexuelle est obligatoire jusqu’à la fin du premier cycle du secondaire dans toutes les instances sauf une. (La province qui ne prescrivait pas l’éducation sexuelle exigeait par contre qu’on donne des cours sur le VIH.)

En Saskatchewan, une évaluation du programme d’études relatif à l’éducation pour la santé (ministère de l’Éducation, 1996) confirme qu’on recommande 120 minutes de cours par semaine en 7e année et 100 minutes par semaine pour les 8e et 9e années. Environ 40 p. 100 des enseignantes et enseignants rapportent dispenser dans les faits moins de 60 minutes de cours par semaine.

Toutes ces études effectuées au Canada semblent faire ressortir que le nombre d’heures consacrées à l’éducation sexuelle a diminué ces dernières années. C’est probablement parce que, dans la plupart des instances, on remarque aujourd’hui une réduction de la période de temps allouée à l’éducation pour la santé, que l’on combine avec les cours d’information sur les carrières ou d’éducation physique. Il semble également que les écoles du pays ne suivent pas nécessairement les prescriptions prévues dans le programme d’études, comme l’a observé Muraskin (1986) dans son étude des arrondissements scolaires américains.

D’autres études accomplies aux États-Unis montrent qu’on prévoit au Canada à peu près le même nombre d’heures d’éducation sexuelle qu’aux États-Unis. Kenney et al. (1989), à la suite d’une enquête menée dans les États américains et dans les grands arrondissements scolaires ont remarqué que 80 p. 100 des États exigent ou encouragent l’enseignement de l’éducation sexuelle et que 90 p. 100 des arrondissements scolaires sont en faveur des cours d’éducation sexuelle. Ces résultats sont toutefois quelque peu biaisés parce que les arrondissements scolaires de plus grande envergure sont souvent plus audacieux que ceux des régions rurales à cet égard.

Holtzman et al. (1992) ont eux aussi mené une enquête auprès des arrondissements scolaires américains et font remarquer que les deux tiers (66,9 p. 100) prescrivent des cours sur le VIH. Ils notent également que l’éducation sexuelle s’offre principalement au premier cycle du niveau secondaire pour tomber complètement au second cycle.

Collins et al. (1995), dans une vue d’ensemble de la School Health Policies and Programs Study des États- Unis, rapportent que 90,2 p. 100 des États et 90,8 p. 100 des arrondissements scolaires prescrivent l’éducation sexuelle. Ils constatent également que 48,9 p. 100 des États et 76 p. 100 des arrondissements scolaires rendent les cours d’éducation sexuelle obligatoires. Une autre analyse de la même étude (Centers for Disease Control, 1997) indique que 78,7 p. 100 des États, 83 p. 100 des arrondissements scolaires et 85,6 p. 100 des écoles secondaires prescrivent des cours de prévention du VIH. On requiert par ailleurs des cours sur les MTS dans 65,1 p. 100 des États, 80,9 p. 100 des arrondissements scolaires et 84,1 p. 100 des écoles secondaires.

Comparons les données des États-Unis à celles collectées dans le cadre de la présente étude. Notons que 100 p. 100 des provinces et des territoires, 87,6 p. 100 des arrondissements scolaires et 84,6 p. 100 des écoles disent prescrire des cours d’éducation sexuelle à un niveau scolaire ou un autre.

Toutefois, dans la School Health Policies and Programs Study, 71,3 p. 100 des écoles mentionnent obliger les élèves qui échouent le cours d’éducation pour la santé à reprendre ce cours. À une question du même ordre dans notre étude, 23,6 p. 100 des écoles ont répondu que leurs élèves devaient aussi reprendre le cours d’éducation pour la santé en cas d’échec.

Conséquences

En conséquence, nous suggérons aux responsables de l’élaboration des politiques de revoir les attentes énoncées en matière d’éducation sexuelle, de manière à assurer que la portée et la séquence des cours d’éducation sexuelle soient appropriées. (Devrions-nous consacrer autant de temps durant le premier cycle du secondaire? Devrions-nous couvrir plus de matière sur la sexualité durant les premières années? Devrions-nous prescrire les cours au second cycle du secondaire, au moment où les élèves ont à prendre des décisions concernant leurs activités sexuelles? Quelles connaissances et quelles compétences devrait- on prévoir? Dans quel ordre devrait-on présenter la matière?)

Nous proposons par ailleurs d’entreprendre des recherches afin de déterminer le niveau de participation minimum aux cours d’éducation sexuelle (et le niveau de maintien subséquent), si on veut influencer efficacement les comportements sexuels chez les adolescentes et adolescents.

9. La moitié des ministères de la Santé rapportent exiger que des services préventifs en santé sexuelle soient offerts directement aux adolescentes et adolescents. Presque tous mentionnent que de tels services sont en fait disponibles pour toute la collectivité. La plupart (les trois quarts) indiquent que l’intervention des infirmières et infirmiers de santé publique auprès des jeunes ou dans les écoles n’est pas clairement définie, mais environ la moitié des services de santé publique disent l’avoir fait. La moyenne des écoles bénéficient chez elles d’environ cinq heures par mois de services d’une infirmière ou d’un infirmier de santé publique. On consacre approximativement une heure aux questions de santé sexuelle. Toutefois, toutes les écoles ne reçoivent pas ce genre de services. Les deux tiers des répondantes et répondants du milieu de la santé disent ne pas faire un suivi périodique des connaissances, des attitudes et des comportements sexuels des jeunes.

Les parents des groupes de discussion estiment que les élèves devraient avoir accès à des condoms, à des tests de grossesse, à des tests de MTS et à des conseils par l’entremise des services préventifs en santé sexuelle. Ils pensent que les élèves ne sont pas au courant des services disponibles en dehors des murs de l’école. Ils sont d’avis aussi que leurs enfants n’auraient pas recours à des services communautaires offerts en clinique en raison des difficultés de transport et de la gêne occasionnée par la façon dont on dispense ces services à l’heure actuelle.

Deux des critères de qualité établis aux fins de la présente étude s’appliquent à l’argumentation de ces constatations. D’abord, tout comme pour le système scolaire, les attentes énoncées dans les politiques des systèmes de santé publique devraient faire état des normes de prestation minimum. En second lieu, on devrait produire à intervalles des évaluations, des études ou des rapports sur les connaissances, les attitudes et les comportements des adolescentes et adolescents en matière de santé sexuelle.

En outre, les travaux de recherche qui confirment le rôle ambigu des infirmières et infirmiers de santé publique pour ce qui est de la promotion de la santé en milieu scolaire fait ressortir l’urgence de clarifier, dans les politiques des systèmes de santé publique, les attentes et la fonction du personnel de santé publique œuvrant en milieu scolaire.

Fisher (1989), Vincent et al. (1987) et bien d’autres personnes ayant mené des études sur la promotion de la santé en milieu scolaire rapportent que le fait de combiner les services préventifs en santé sexuelle avec l’éducation sexuelle permet d’influencer favorablement les comportements des jeunes.

Aux États-Unis, en Europe et en Australie, on utilise en milieu scolaire des modèles de promotion de la santé qui mettent, contrairement au Canada, une plus grande emphase sur la prestation de services préventifs de santé dans les écoles (Neylon, 1993; Bradley, 1997). Langille et al. (sans date) indiquent, dans un rapport d’enquête effectuée auprès d’un échantillon de parents d’une collectivité rurale de la Nouvelle-Écosse, que 84 p.100 des personnes interrogées estiment que le personnel de santé publique devrait jouer une grande part dans les programmes d’éducation sexuelle en milieu scolaire.

À la suite d’une enquête menée auprès des infirmières et infirmiers travaillant dans des écoles d’un échantillon donné aux États-Unis, Kohokovich et Bonovich (1992) concluent ce qui suit :

  • 73 p. 100 des personnes interrogées font appel au personnel enseignant pour coordonner le programme d’éducation sexuelle;
  • moins de 20 p. 100 suggèrent à des élèves de passer des tests ou offrent des conseils relatifs à la santé sexuelle;
  • presque personne ne jouent un rôle d’éducation dans l’école;
  • très peu utilisent de manière cohérente les ressources scolaires et les ressources de la collectivité.

Chambers et al. (1994), après une étude sur les infirmières et infirmiers de la santé publique en Ontario, soulignent que ces personnes s’occupent d’éducation, de consultation, de marketing social et d’animation, mais qu’elles ont besoin de formation en cours d’emploi pour pouvoir travailler au développement communautaire, à la revendication et aux politiques, à la recherche et à l’évaluation ainsi que pour être en mesure de se charger de la coordination et de la gestion des ressources. De surcroît, 10 p. 100 du personnel mentionne ne pas fournir sur place des services préventifs de santé.

Dans une enquête similaire sur le personnel infirmier des écoles de 40 villes américaines, Hacker et al. (1992) rapportent que ce personnel intervient en ce qui a trait à l’éducation et à la consultation (79 p. 100), aux services directs (76 p. 100), au dépistage de problèmes de santé (76 p. 100), à l’aide en matière d’éducation de l’enfance en difficulté (72 p. 100), aux activités de prévention (72 p. 100), à l’aiguillage et au suivi (42 p. 100), aux services pour les jeunes à risque élevé (33 p. 100) et autres (27 p. 100).

Small et al. (1995) ont analysé la partie de la School Health Policies and Programs Study qui traite des services de santé offerts en milieu scolaire aux États-Unis. Ils rapportent ce qui suit :

  • 14 p. 100 des États américains fixent un rapport minimum entre les infirmières ou infirmiers et les élèves;
  • 59,2 p. 100 des États subventionnent des services de santé en milieu scolaire ou qui sont coordonnés avec les écoles;
  • plus de la moitié des écoles (57,3 p. 100) signalent avoir à leur emploi une infirmière ou un infirmier.

Small et al. ajoutent qu’on n’a pas clairement défini les rôles, les responsabilités et la formation requise des responsables des services de santé en milieu scolaire. L’étude en question fait mention qu’on ne s’entend pas vraiment non plus sur les fonctions que doivent exécuter ces spécialistes de la santé.

Conséquences

En conséquence, nous proposons d’entreprendre des travaux de recherche sur le rôle que pourrait jouer le personnel de la santé publique en milieu scolaire. Pour ce faire, on devrait s’intéresser à la rentabilité et aux avantages-coûts de telles tâches. Il y aurait en outre lieu d’examiner les politiques et les pratiques en vigueur sur la question dans d’autres pays industrialisés.

10. Les répondantes et répondants du secteur de l’éducation font savoir que le personnel enseignant et les autres personnes concernées ont normalement accès à une liste du matériel pédagogique autorisé pour l’éducation sexuelle.

Cette observation laisse supposer que la constitution et la distribution de la liste s’accomplissent de manière systématique.

Un seul rapport fait état de la question. En effet, dans une étude sur l’exécution de son Junior High Health Education Program, le ministère de l’Éducation de la Saskatchewan (1996) constate que le personnel enseignant souhaite que le programme soit mieux structuré et que la liste des ressources pédagogiques soit dressée en fonction du niveau scolaire et des résultats d’apprentissage, de manière à faciliter la recherche et l’utilisation. Les enseignantes et enseignants veulent aussi avoir accès à des modèles et à des suggestions de plan de leçon ayant un début et une fin clairement définis.

Conséquences

En conséquence, nous proposons que Santé Canada et les ministères de l’Éducation travaillent avec les organisations commerciales ou sans but lucratif, qui produisent du matériel didactique traitant d’éducation sexuelle, à l’établissement d’une liste de tout le matériel pertinent sur le marché. La liste devrait se diviser par niveau scolaire, par résultats d’apprentissage et par emplois possibles en salle de classe.

11. La plupart des systèmes scolaires ont mis en œuvre des politiques visant à protéger les droits des élèves et du personnel enseignant séropositif. Dans 76,5 p. 100 des arrondissements scolaires, de telles politiques garantissent le droit des élèves à poursuivre leur éducation et le droit du personnel enseignant à conserver son emploi. À peu près les trois quarts des arrondissements scolaires et la moitié des ministères de l’Éducation font savoir que ces politiques garantissent le traitement confidentiel des dossiers.

Cette constatation s’apparente à celle d’autres études menées aux États-Unis. Holtzman et al. (1992), par exemple, ont effectué une enquête auprès des arrondissements scolaires américains. Ils font les deux observations suivantes : 60,3 p. 100 des arrondissements scolaires ont instauré des politiques garantissant le droit des élèves séropositifs de continuer leurs études et 41,2 p. 100, des politiques donnant au personnel séropositif le droit de conserver son emploi.

Small et al. (1995) ont analysé la partie de la School Health Policies and Programs Study qui traite de la même question. Il en ressort que 71,7 p. 100 des arrondissements scolaires des États-Unis ont en place des politiques visant à protéger le droit des élèves séropositifs de poursuivre leurs études et celui des enseignantes et enseignants séropositifs de conserver leur emploi. Les répondantes et répondants (70,1 p. 100) signalent que ces politiques prévoient la confidentialité de l’information.

Conséquences

En conséquence, nous suggérons que les autorités scolaires et de santé publique se penchent sur les autres facteurs pouvant limiter ou entraver les droits des personnes séropositives ou d’autres personnes à l’égalité d’accès à l’éducation, à l’emploi, à des services de santé ainsi qu’à l’entraide et à la sécurité dans leur milieu.

12. Seul un petit nombre d’autorités scolaires et de santé publique ont énoncé les qualifications de base requises pour dispenser les cours d’éducation sexuelle ou pour travailler à la promotion de la santé sexuelle chez les adolescentes et adolescents. Moins du quart des ministères de l’Éducation et des arrondissements scolaires exigent des titres de compétences pour enseigner les cours d’éducation sexuelle. Un tiers des enseignantes et enseignants d’éducation sexuelle n’ont en fait reçu aucune formation et un autre tiers n’ont participé qu’à un séminaire ou à un atelier à l’université avant de donner de tels cours. Autour de la moitié des ministères de la Santé et des services de santé publique indiquent exiger du personnel de santé publique une formation de base en matière de sexualité. Ceci dit, un petit nombre seulement des personnes interrogées dans le milieu de la santé signalent exiger des qualifications de base pour travailler avec les jeunes ou en milieu scolaire. La plupart des infirmières et infirmiers de santé publique indiquent posséder un diplôme en sciences infirmières. Environ le tiers ajoutent qu’ils ont complété une majeure ou une mineure en sexualité ou en promotion de la santé auprès des enfants et des jeunes.

Cette observation tend à renforcer les commentaires formulés par les élèves et les parents lors des séances de discussion. Les parents et les élèves à la fois estiment que le personnel enseignant est gêné de discuter de certains sujets d’ordre sexuel. Les critères de qualité rattachés à cette constatation se justifient d’eux- mêmes. En effet, il est impératif que le personnel enseignant et les infirmières et infirmiers de santé publique détiennent les titres de compétence nécessaires pour accomplir leur fonction respective auprès des jeunes pour ce qui est de la promotion de la santé sexuelle et la prévention du VIH et des MTS.

Les rapports d’étude et de recherche confirment le fait que le personnel de première ligne dans les secteurs de l’éducation et de la santé publique ne possèdent pas toutes les qualifications requises pour assumer leur rôle.

À la suite d’une enquête menée auprès des spécialistes de la santé, Quinn et al. (1990) rapportent que la formation des spécialistes de la santé montre des lacunes évidentes. Shannon et McCall (1994), après avoir étudié les programmes des sciences de la santé des collèges, cégeps et universités canadiennes, rapportent que 26,8 p. 100 ont instauré un nouveau cours ou une partie de cours afin de préparer les spécialistes au VIH/sida et un autre 12,8 p. 100 tiennent un séminaire annuellement.

Un rapport d’étude portant sur 245 arrondissements scolaires de quatre provinces du Canada (Ajzenstat et Gentles, 1988) renferme des commentaires à l’effet que parmi les arrondissements scolaires étudiés, seulement cinq exigent une formation de base de la part du personnel donnant les cours d’éducation sexuelle, et 65 obligent ce personnel à suivre une formation en cours d’emploi.

Une étude menée par le ministère de l’Éducation de la Saskatchewan (1996) indique que 55 p. 100 des enseignantes et enseignants des cours d’éducation pour la santé n’ont suivi aucun cours relié à cette matière pendant leurs études universitaires.

Après avoir examiné la partie de la School Health Policies and Programs Study qui traite de la même question, Collins et al. (1995) rapportent que 68,6 p. 100 des États américains à l’étude requièrent du personnel enseignant au secondaire des titres de compétence en éducation pour la santé. En outre, 5,9 p. 100 des États signalent exiger du personnel enseignant au primaire des titres de compétence pour donner de la matière sur la santé. Les auteurs du rapport soulignent également qu’environ le tiers des enseignantes et enseignants des cours d’éducation sexuelle n’ont suivi aucune formation en éducation pour la santé avant de dispenser la matière, tout comme il en est ressorti de la présente étude.

Chambers et al. (1994) signalent, dans une étude sur les infirmières et infirmiers de santé publique en Ontario, que les plus hauts niveaux de formation relevés s’établissent comme suit :

Infirmière ou infirmier 6,7 p. 100

Diplôme en sciences infirmières (santé publique) 11,3 p. 100

Baccalauréat (sciences infirmières) 70,2 p. 100

Maîtrise (sciences infirmières) 3,1 p 100

Maîtrise (autre) 4,4 p. 100

Autre diplôme ou grade 4,1 p. 100

Small et al. (1995) mentionnent, après avoir examiné eux aussi les données de la School Health Policies and Programs Study, que 62 p. 100 des États américains offrent un programme de délivrance du certificat d’aptitude pédagogique pour le corps infirmier travaillant en milieu scolaire. Environ les deux tiers de ces États (plus ou moins la moitié de l’ensemble des États) exigent ce titre des personnes désirant être embauchées dans un milieu scolaire. Ils signalent que 31,4 p. 100 du personnel infirmier œuvrant dans une école sont des infirmières ou infirmiers et 32 p. 100 détiennent un grade d’une discipline autre que les sciences infirmières.

Conséquences

En conséquence, nous suggérons de préciser les qualifications et toute formation additionnelle requises pour préparer les infirmières et infirmiers à travailler en milieu scolaire avec les jeunes et à traiter des questions sexuelles.

13. Entre 30 et 40 p. 100 des ministères de l’Éducation et de la Santé, des arrondissements scolaires et des services de santé publique ont en place une politique explicite favorisant l’approche globale sur la santé en milieu scolaire. La plupart des ministères de la Santé mentionnent exiger du personnel et des services de santé publique qu’ils coordonnent leurs efforts entre l’école et la collectivité quant à la prévention du VIH.

Cette constatation au sujet de la coordination des efforts entre le milieu scolaire et la collectivité donne une idée de l’importance croissante que prend la stratégie de promotion de la santé introduite au Canada à la fin des années 1980. En 1990, seulement 3 p. 100 d’un échantillon de 2000 chefs de file des secteurs de l’éducation et de la santé (Santé Canada, 1991) avaient entendu parler du concept. Une décennie plus tard, plus du tiers des arrondissements scolaires et des services de santé publique locaux avaient expressément adopté cette approche.

Étant donné que nous avons articulé la présente étude autour de l’approche globale sur la santé en milieu scolaire et de ses applications en matière de prévention du VIH et de promotion de la santé sexuelle, nous trouvons cette constatation très encourageante. En revanche, dans d’autres rapports de recherche (Wiley et al., 1991) sur l’adoption du concept dans sept arrondissements scolaires du Texas, on signale qu’il s’avère difficile d’assurer la coordination des programmes et des services, malgré tout l’appui reçu.

La School Health Policies and Programs Study (Collins et al., 1995) ne consistait pas à savoir s’il existait une politique particulière concernant l’approche globale sur la santé en milieu scolaire. Ceci dit, 96,1 p. 100 du personnel affecté à l’éducation pour la santé au palier des États et 59,4 p. 100 du même personnel au palier des arrondissements scolaires signalent travailler avec d’autres groupes et d’autres personnes-ressources afin de coordonner les efforts collectifs en milieu scolaire.

Par ailleurs, Collins et al. (1995) rapportent qu’à peu près le tiers des arrondissements scolaires soulignent avoir un comité ou un conseil consultatif sur la santé en milieu scolaire.

Les résultats de la présente étude concernant les activités des comités sur l’approche globale sur la santé en milieu scolaire se comparent aux constatations découlant de l’étude des États-Unis. En effet, 36,4 p. 100 des personnes interrogées dans les ministères de l’Éducation indiquent participer à un comité interministériel dynamique, piloté par le ministère de la Santé, sur la promotion de la santé sexuelle. En outre, 35,8 p. 100 des arrondissements scolaires notent qu’ils participent, à l’échelle locale, à un comité interinstitutionnel dynamique sur la santé sexuelle.

Conséquences

En conséquence, nous proposons de prendre les sources de données les plus pertinentes dans la présente étude et de les incorporer dans un mécanisme de suivi permanent de plus grande envergure. On pourra ainsi suivre l’instauration des politiques et des programmes de santé en milieu scolaire.

14. Un petit nombre des personnes interrogées dans le secteur de la santé (16,7 p. 100 des ministères de la Santé et 38,6 p. 100 des services de santé publique) indiquent disposer de politiques officielles concernant la santé des adolescentes et adolescents. La plupart de répondantes et répondants du secteur de l’éducation (76,8 p. 100 des arrondissements scolaires et 80,2 p. 100 des directions d’école) soulignent que la mission des écoles favorise le développement social et sain de l’enfant.

Cette observation présente un problème et une possibilité à la fois. Il faudra se pencher sur le petit nombre des politiques de santé publique concernant la santé des adolescentes et adolescents, si on veut cibler ou faire intervenir davantage le milieu scolaire quant aux programmes de promotion de la santé. Pour les systèmes scolaires, il serait possible de persuader le personnel enseignant de promouvoir la santé plus énergiquement si les politiques étaient reliées au développement social et personnel ainsi qu’au rendement scolaire de l’enfant. En effet, rappelons que les églises et les organismes de charité ont d’abord fondé les écoles du Canada pour des raisons sociales, non pas scolaires.

Conséquences

En conséquence, nous estimons que les autorités de la santé publique auraient avantage à élaborer des politiques et des stratégies explicites et complètes en ce qui concerne la santé des adolescentes et adolescents. Nous pensons également que ces politiques devraient aborder la question du meilleur cadre pour atteindre la jeunesse, comme l’école, les organismes œuvrant auprès des jeunes et les programmes récréatifs.

15. Il est clair que la sexualité et l’éducation sexuelle n’arrivent pas en tête des priorités des systèmes scolaires. Les personnes interrogées ont placé ces deux sujets en dessous de presque toutes les autres matières enseignées dans les écoles. Cependant, les répondantes et répondants du secteur de la santé considèrent la sexualité comme relativement importante par rapport aux autres questions de santé. Ceci dit, la plupart ajoutent que la santé des jeunes passe après la santé des enfants dans leur système.

Cette observation contredit nettement les points de vue exprimés par les parents et les élèves lors des séances de discussion. Ces derniers estiment effectivement que l’éducation sexuelle devrait recevoir une plus grande attention.

Selon notre critère de qualité en matière d’élaboration des politiques, les responsables de l’élaboration des politiques devraient veiller à énoncer en termes clairs en plus de bien faire comprendre les priorités (Broadfoot et al., 1994; Crighton, 1987).

Une enquête menée aux États-Unis (Palfrey et al., 1994) vient peut-être contredire notre observation au sujet du faible intérêt accordé au VIH et à la sexualité. On avait demandé à des arrondissements scolaires de classer la prévention du VIH parmi une liste de neuf sujets, les autres étant : la violence, la drogue, le programme d’études en général, l’éducation de l’enfance en difficulté, l’éducation pour la santé, les sports, la musique et les arts. Des personnes interrogées, 37 p. 100 classent la prévention du VIH dans la première moitié des sujets.

La dernière observation à l’effet que la santé des enfants passe avant la santé des adolescentes et adolescents va à l’encontre du concept de santé de la population. Quand on veut favoriser la santé de la population entière, on doit s’intéresser à tous les groupes d’âge. Dans un exposé de principe de Santé Canada (1996), on souligne que le concept de santé de la population fait allusion à toutes les catégories de personnes, à des facteurs collectifs ainsi qu’à des conditions qui peuvent s’appliquer à toutes les strates de la population.

Conséquences

En conséquence, nous suggérons que les systèmes scolaire et de santé publique examinent la cohérence de leurs efforts pour prévenir le VIH et les MTS et pour promouvoir la santé sexuelle. La question ne revêt peut-être pas une grande importance pour ces secteurs, mais elle vaut encore la peine de s’y attarder sérieusement à intervalles réguliers.

16. Chez les ministères de l’Éducation et de la Santé, les arrondissements scolaires et les services de santé publique, on élimine à l’heure actuelle les tâches relatives à la promotion de la santé sexuelle et à l’éducation sexuelle pour les combiner à d’autres. Environ la moitié (58,3 p. 100) des ministères de la Santé rapportent avoir dans leur effectif un coordonnateur de la prévention du VIH et de la promotion de la santé sexuelle chez les jeunes. Environ la moitié des services de la santé indiquent qu’une personne s’occupe de la sexualité dans leur équipe chargée de la santé des jeunes. Les trois quarts mentionnent qu’une personne a la responsabilité de la prévention dans l’équipe chargée du VIH. Les trois quarts des arrondissements scolaires (76,9 p. 100) signalent qu’une personne est responsable de l’éducation sexuelle et de l’éducation pour la santé. Environ les deux tiers des directions d’école mentionnent avoir parmi les membres de leur personnel une personne chargée de la coordination. Mentionnons qu’entre 30 et 40 p. 100 de tous ces postes sont à l’étude.

On doit clairement définir les tâches si on veut obtenir des résultats probants. On doit par ailleurs prévoir et combler des postes de coordination ou d’administration appropriés, si on veut réaliser les objectifs de la politique (Odden, 1991; Macbeth, 1990; Organisation mondiale de la santé, 1990; Santé Canada, 1994).

Par le passé, l’éducation sexuelle revenait en général à un conseiller ou à une conseillère en programmes d’éducation pour la santé qui était à l’emploi des ministères de l’Éducation et des arrondissements scolaires. Au sein des ministères de la Santé, on formait souvent une équipe chargée de la prévention du VIH, où au moins une personne devait s’occuper de la jeunesse. À la suite des réductions de l’effectif et des restructurations, les deux secteurs ont ajouté d’autres responsabilités à la définition des tâches correspondant à ce poste ou ont tout simplement éliminé le poste.

Le groupe de discussion formé de parents du Québec est d’avis que l’infirmière ou l’infirmier de santé publique qui est à l’emploi du CLSC devrait assurer la coordination des activités et des programmes.

La littérature reflète l’observation ressortant de la présente étude. Entre autres, Holtzman et al. (1992) à la suite d’une enquête effectuée aux États-Unis, rapporte qu’une personne est affectée à la coordination du programme d’éducation pour la santé dans 23 p. 100 des arrondissements scolaires. Dans le rapport d’étude sur le Junior High School Program qu’avait commandé le ministère de la Saskatchewan (1996), on indique que 28 p. 100 des écoles du Canada ont accès dans leur arrondissement scolaire à un conseiller ou à une conseillère en éducation pour la santé. Après avoir analysé la partie de la School Health Policies and Programs Study qui traite des services de santé offerts dans les écoles des États-Unis, Small et al. (1995) signalent que 75,5 p. 100 des États américains affectent une personne à la coordination des services de santé en milieu scolaire. Les trois quarts de ces personnes doivent néanmoins exécuter d’autres tâches. Enfin, 74,6 p. 100 des arrondissements scolaires embauchent quelqu’un pour coordonner les services de santé en milieu scolaire.

Collins et al. (1995) rapportent, après une analyse semblable de l’étude américaine, que tous les États sans exception et 55,1 p. 100 des arrondissements scolaires emploient une personne chargée de la coordination de l’éducation pour la santé. Cette personne est également responsable de l’éducation physique, de l’éducation sexuelle (dont la prévention du VIH) et de tâches connexes. Collins et al. se montrent inquiets du fait qu’un manque de leadership de la part des écoles risque de se traduire (si on ne prévoit aucun poste pour l’administration ou la coordination) par un désintérêt envers la santé.

Conséquences

En conséquence, nous estimons que les systèmes scolaire et de santé publique devraient affermir leurs partenariats avec les organisations bénévoles œuvrant dans le domaine de la santé et intervenant sur le plan du VIH, des MTS et de la sexualité. On devrait inciter ces organisations à travailler plus étroitement avec le personnel scolaire et les infirmières et infirmiers de santé publique. Nous proposons par ailleurs de faciliter l’accès électronique au matériel didactique, aux plans de leçon et aux activités pédagogiques. On devrait lancer un appel à la mobilisation pour dresser la liste, cataloguer, charger et maintenir ces ressources et ces plans de leçon dans Internet. On devrait prévoir un format simple d’utilisation afin de compenser, pour les spécialistes de première ligne, le manque d’aide disponible en raison des coupures de postes.

17. Parmi les personnes interrogées à tous les paliers des ministères de la Santé et de l’Éducation, un petit nombre indique encourager systématiquement l’excellence et l’innovation se rattachant à la promotion de la santé sexuelle et à la prévention du VIH et des MTS auprès des jeunes. Moins de 25 p. 100 signalent offrir régulièrement des subventions d’encouragement ou à l’innovation. Moins de 30 p. 100 des ministères de la Santé et de l’Éducation, des arrondissements scolaires et des directions d’école affirment organiser des ateliers afin de promouvoir les programmes novateurs. La moitié des ministères de la Santé et un tiers des services de santé publique s’occupent de diffuser périodiquement les résultats de recherche. D’autre part, 90 p. 100 des ministères de l’Éducation déclarent entretenir des relations avec les spécialistes de l’éducation et de la santé afin de faciliter la mise en œuvre des politiques. Environ la moitié (54,5 p. 100) soulignent avoir mis en place un réseau électronique afin de permettre au personnel enseignant d’échanger des idées sur les cours de santé et de sexualité.

Les travaux de recherche sur l’efficacité du processus d’instauration des politiques font ressortir le besoin, pour faciliter la mise en œuvre, de diffuser régulièrement les rapports sur les meilleures pratiques et d’entretenir des réseaux (Maclean, 1996; Organisation mondiale de la santé, 1997; ministère de l’Éducation de la Saskatchewan, 1996).

La littérature fait nettement transparaître cette nécessité. Les responsables des politiques dans le secteur de l’éducation peuvent faire naître et favoriser l’innovation s’ils peuvent utiliser ce genre d’incitatif (Jubb, 1989; Shannon et McCall, 1993).

Dans le rapport d’évaluation du programme d’éducation pour la santé qui est en vigueur en Saskatchewan (ministère de l’Éducation, 1996), on signale que le personnel enseignant des collèges apprécie les échanges professionnels parce que ces derniers se révèlent une source d’entraide en ce qui a trait à la mise en œuvre. On indique par ailleurs que 20 p. 100 des enseignantes et enseignants mentionnent être abonnés à une revue d’éducation pour la santé. Le rapport contient des recommandations concernant l’établissement d’interréseaux dans les arrondissements scolaires et entre eux. À la suite d’une étude des systèmes de santé publique du Canada, Bell et Joly (1997) se disent préoccupés par l’appauvrissement des pratiques de santé publique et de la capacité de diffuser le fruit des recherches que risquent de provoquer la restructuration et la décentralisation des systèmes de santé publique.

Conséquences

En conséquence, nous sommes d’avis qu’il faudrait demander à des organismes particuliers, comme les Centres d’excellence pour le bien-être des enfants de Santé Canada, le Réseau canadien de la santé et le Centre canadien de documentation sur le VIH/sida, de se pencher sur la meilleure façon de faciliter la dissémination des rapports de recherche, dont ceux contenant la liste des meilleures pratiques, aux personnes œuvrant à l’intérieur ou avec les systèmes scolaires à la promotion de la santé sexuelle et à la prévention du VIH et des MTS.

18. Seul un petit nombre des personnes interrogées dans le cadre de notre étude signalent exiger de leurs organismes auxiliaires des politiques ou des plans d’action complets. En effet, 9,1 p. 100 des ministères de l’Éducation imposent aux arrondissements scolaires de mettre en place une politique détaillée sur le VIH, et 27,3 p. 100 indiquent avoir publié des lignes directrices ou des modèles de politiques. Aucun des ministères de l’Éducation ne rapporte faire un suivi de ces politiques dans les arrondissements scolaires, et 9,1 p. 100 disent obliger ces derniers à mettre en œuvre un plan d’action sur le sida et la sexualité. D’autre part, 41,7 p. 100 des ministères de la Santé indiquent avoir publié des modèles de politiques et 58,3 p. 100, contrôler la teneur de ces politiques. Enfin, 8,3 p. 100 disent demander périodiquement aux services de santé publique de leur soumettre un plan d’action sur le VIH et la sexualité.

Les travaux de recherche sur l’efficacité de l’élaboration des politiques laissent entendre que l’orientation stratégique devrait tenir compte des ressources allouées (Consortium for Policy Research in Education, 1996; Funk, 1991; Tymko, 1980, Association canadienne de santé publique, 1993; Santé Canada, 1994).

Les travaux sur la réforme de l’éducation font ressortir la possibilité de faciliter la mise en œuvre descendante peut être améliorée si on s’appuie sur des politiques et des plans d’action pertinents (Shannon et McCall, 1993).

Encore une fois, examinons ce qui se passe aux États-Unis en comparant les données découlant de la School Health Policies and Programs Study. Small et al. (1995) rapportent que 58,8 p. 100 des États à l’étude imposent aux arrondissements scolaires d’émettre une politique sur le VIH. De nombreux États recommandent l’insertion de différents points dans cette politique, notamment en ce qui concerne : la confidentialité (90,2 p. 100), le soutien au cours sur le VIH (80,4 p. 100), l’aide au personnel enseignant sur place (78,4 p. 100) et la protection des élèves séropositifs (68,6 p. 100).

Conséquences

En conséquence, nous proposons de mener des travaux de recherche qualitative sur le fonctionnement des systèmes scolaire et de santé publique en regard de la mise en œuvre de politiques de prévention et de promotion de la santé.

19. Moins de la moitié des ministères de l’Éducation et de la Santé, des arrondissements scolaires, des services de santé publique et des directions d’école rapportent financer, organiser ou appuyer systématiquement le perfectionnement professionnel du personnel enseignant. Un tiers des ministères de la Santé et les deux tiers des services de santé publique soulignent fournir régulièrement de la formation en cours d’emploi aux infirmières et infirmiers de santé publique.

La littérature sur l’efficacité de l’élaboration des politiques laisse entendre qu’un perfectionnement professionnel systématique et continu s’avère essentiel à l’instauration des politiques (Butler, 1993; Popham et Muethen, sans date; Shannon et McCall, 1990, Santé Canada, 1994; Association canadienne de santé publique, 1993; MacKinnon et al., 1994).

Comparons ici nos résultats avec ceux de la School Health Policies and Programs Study. Collins et al. (1995) mentionnent que les États américains fournissent de la formation en cours d’emploi comme suit : éducation pour la santé — 98 p. 100; prévention du VIH — 98 p. 100; prévention des MTS — 84 p. 100. Pour ce qui est des arrondissements scolaires, les données sont les suivantes : éducation pour la santé — 83,6 p. 100; prévention du VIH — 58,4 p. 100; prévention des MTS — 58,4 p. 100. Un rapport d’enquête publié quelques années auparavant (Holtzman et al., 1992) indiquait que 57 p. 100 des arrondissements scolaires offraient de la formation en cours d’emploi relativement au VIH.

Small et al. (1995) rapportent, après avoir examiné la formation offerte en cours d’emploi au personnel des services de santé en milieu scolaire qui avait participé à la School Health Policies and Programs Study, que 82,4 p. 100 des États américains et 18,7 p. 100 des arrondissements scolaires offrent à ce personnel de la formation sur place en prévention de la grossesse.

Conséquences

En conséquence, nous suggérons que les systèmes scolaire et de santé publique explorent les différents moyens rentables de fournir en permanence à leur personnel de première ligne de la formation en cours d’emploi sur la promotion de la santé sexuelle et la prévention du VIH et des MTS. Il pourrait s’agir de la formation à distance, de la mise en commun des fonds alloués par les deux secteurs à la formation en cours d’emploi, de l’obtention d’un appui des entreprises et d’un travail plus étroit avec les organismes bénévoles œuvrant dans le domaine de la santé.

20. Pour appuyer la collaboration interministérielle dans les deux systèmes, on n’a pas souvent recours à des protocoles officiels, à des comités interministériels, à l’allocation de temps pour le personnel ou à des politiques de coordination. Des ministères de l’Éducation, 36,4 p. 100 disent avoir un protocole sur le VIH et la sexualité, 18,2 p. 100, un comité interministériel sur l’éducation sexuelle (avec rencontres périodiques) et 45,5 p. 100, encourager les arrondissements scolaires à travailler avec les services de santé publique. Des ministères de la Santé, 33,3 p. 100 rapportent participer à un comité interministériel sur la prévention et 25 p. 100, allouer à leur personnel du temps pour les activités de collaboration.

Cette constatation contredit l’un des critères de qualité retenus pour notre étude relativement à l’élaboration des politiques. Le critère en question repose sur l’idée que les deux systèmes encouragent la collaboration (Muller et Pollard, 1994; Association canadienne des administrateurs et des administratrices scolaires, 1992; Capper et al., 1996; Odden, 1991; Association canadienne pour l’éducation à la santé, 1994; Fisher, 1990; Baldwin et al., 1990; Barret, 1990; Institute of Medicine, 1997).

On avait posé une question similaire dans le cadre de la School Health Policies and Programs Study. Parmi les coordonnateurs de l’éducation pour la santé dans les États américains, 96,1 p. 100 affirment faire partie d’un comité interministériel chargé de la promotion de la santé en milieu scolaire.

L’Organisation mondiale de la santé (1997) laisse entendre que les centres de santé locaux devraient agir comme carrefour pour ce qui est des activités intersectorielles au sein d’une collectivité. On présente une vision semblable pour les services de santé publique de la région (Southern Metropolitain Region, 1998).

Conséquences

Il faut renforcer, soutenir et multiplier la collaboration entre les deux secteurs en ce qui regarde la promotion de la santé sexuelle des adolescentes et adolescents.

En conséquence, nous proposons que les stratèges des systèmes scolaire et de santé publique évaluent et rehaussent leurs efforts de collaboration en matière de promotion de la santé sexuelle et de prévention du VIH et des MTS.

21. Pour appuyer la collaboration interinstitutionnelle, c’est-à-dire entre les arrondissements scolaires et les services de santé publique, on n’a pas souvent recours à des protocoles officiels ni à des comités dynamiques. En effet, 34,6 p. 100 des arrondissements scolaires rapportent qu’il existe dans leur collectivité un protocole officiel sur le VIH et la sexualité. En outre, 32,8 p. 100 des services de santé publique signalent piloter les activités énergiques d’un comité interinstitutionnel sur la prévention. Seulement 7,4 p. 100 des arrondissements scolaires mentionnent inviter les services de santé publique à avoir une représentation au sein d’un comité sur la santé en milieu scolaire. En outre, 30,3 p. 100 du corps infirmier dit participer régulièrement ou en partie à un comité de ce genre, et 65,7 p. 100 des services de santé publique affirment allouer du temps pour le travail de collaboration de leur personnel. Parmi les arrondissements scolaires, 74,1 p. 100 déclarent inciter leurs écoles à collaborer avec les organismes de santé.

D’autres études sur le sujet laissent entendre que ces résultats se rapprochent ou revêtent un moindre intérêt que ceux obtenus dans d’autres instances.

À la suite d’une enquête menée il y a quelques années (Association canadienne des administrateurs et des administratrices scolaires, 1992), on note que 56,8 p. 100 des arrondissements scolaires à l’étude affirment avoir mis en place un comité interinstitutionnel dynamique sur le VIH et la sexualité. Hacker et al. (1994), après une enquête auprès des arrondissements scolaires de 40 villes américaines, font savoir que 45 p. 100 des arrondissements scolaires disent avoir formé un comité consultatif communautaire sur l’éducation pour la santé. Par ailleurs, Holtzman et al. (1992), à la suite d’un sondage auprès de tous les arrondissements scolaires des États-Unis, font remarquer que 71,2 p. 100 ont créé un comité consultatif sur le programme d’éducation sexuelle.

En rapport avec la School Health Policies and Programs Study, Collins et al. (1995) soulignent que 33,5 p. 100 des arrondissements scolaires affirment avoir en place un comité consultatif sur la santé en milieu scolaire. Small et al. (1995), après avoir examiné les réponses du personnel des services de santé, mentionnent pour leur part que 61,4 p. 100 des personnes interrogées déclarent coopérer avec d’autres parties concernées pour ce qui est des activités et des programmes relatifs au milieu scolaire.

Conséquences

En conséquence, nous estimons que les stratèges des arrondissements scolaires et des services de santé publique auraient avantage à analyser et à renforcer leur capacité à collaborer en vue de promouvoir la santé sexuelle et de prévenir le VIH et les MTS.

22. On ne surveille pas systématiquement la performance et les réalisations des deux systèmes. On n’évalue pas et on n’utilise pas régulièrement les dossiers sur le rendement scolaire en éducation pour la santé. On communique rarement les progrès réalisés en matière de prévention du VIH. On n’évalue qu’à l’occasion la prestation des services de santé. On évalue les élèves à l’aide de diverses méthodes, mais on n’utilise pas les données dans les systèmes d’indicateurs ou dans les rapports annuels des ministères de l’Éducation. Environ la moitié des personnes interrogées dans le milieu de la santé expliquent qu’elles doivent faire rapport à intervalles réguliers des progrès réalisés en prévention. Un petit nombre des répondantes et répondants des secteurs de la santé et de l’éducation mentionnent contrôler la satisfaction des élèves ou des parents quant aux programmes et aux services fournis. Enfin, 41,7 p. 100 des ministères de la Santé et 4,8 p. 100 des services de santé publique disent s’intéresser à l’opinion publique à l’égard de la prévention du VIH.

Les constatations des groupes de discussion font ressortir l’urgence et le besoin constant de surveiller les services et le niveau de satisfaction des élèves pour ce qui est des programmes d’éducation sexuelle et des services préventifs de santé. Dans tous les groupes de discussion, les élèves ne sont généralement pas satisfaits des cours d’éducation sexuelle reçus. Presque aucun ne connaît les services préventifs en santé sexuelle qui sont adéquatement adaptés à la jeunesse dans leur collectivité.

Les parents participant aux séances de discussion sont d’avis que l’éducation sexuelle dispensée à leurs enfants n’est pas suffisante, arrive trop tard et ne va pas assez en profondeur. Ils ne sont pas au courant ou bien ne sont pas satisfaits des services préventifs en santé sexuelle auxquels ont accès les jeunes. Ils estiment primordiales les questions de confidentialité et d’accessibilité.

Ces données vont à l’encontre de trois des critères de qualité retenus pour la présente étude relativement à l’élaboration des politiques. Premièrement, il doit exister des mécanismes pour évaluer les progrès (Granaheim et al., 1998; Miller et al., 1995; Institute of Medicine, 1997). On doit ensuite faire régulièrement rapport de ces progrès (Funk, 1991; Santé Canada, 1994; Institute of Medicine, 1997). Enfin, on devrait faire état périodiquement à la population et à la clientèle de la performance du système (Association des administrateurs et des administratrices scolaires, 1992; Institute of Medicine, 1997).

Commandé par le ministère de l’Éducation de la Saskatchewan (1996), le rapport d’évaluation du programme d’éducation pour la santé de la 7e à la 9e années fait état des observations des élèves. Celles-ci s’apparentent en fait à celles de la présente étude. La redondance de la matière s’avère la critique la plus courante des élèves. Après des séances de discussion avec les élèves de la Nouvelle-Écosse, Beazley et al. (1996) font remarquer que le personnel enseignant des cours d’éducation sexuelle change rarement les méthodes pédagogiques, qu’il ne rend pas les cours intéressants et qu’il ne prend pas la matière au sérieux. Les auteurs mentionnent de surcroît que les élèves ont une expérience très diversifiée des cours d’éducation sexuelle; la matière couverte et la méthode d’enseignement varient énormément.

Dans l’étude du ministère de l’Éducation de la Saskatchewan (1996), on note que les enseignantes et enseignants font appel à toute une gamme de stratégies pour évaluer les acquis de leurs élèves relativement à l’éducation pour la santé. En effet, 73 p. 100 administrent des tests écrits, 87 p. 100 passent par des présentations orales devant la classe et 68 p. 100 demandent aux élèves d’évaluer eux-mêmes leurs progrès.

Les données de la School Health Policies and Programs Study (Collins et al., 1995) ressemblent à celles de la Saskatchewan quant à la variété des méthodes d’évaluation utilisées par le personnel enseignant. À peu près les trois quarts des écoles obligent en plus les élèves à reprendre le cours d’éducation pour la santé advenant un échec, ce qui laisse transparaître le plus grand accent accordé au rendement scolaire aux États-Unis qu’au Canada.

Conséquences

En conséquence, nous suggérons d’accomplir un certain nombre d’études de base à l’échelle pancanadienne afin d’aider les provinces et les territoires à évaluer leurs progrès en matière de promotion de la santé sexuelle chez les adolescentes et adolescents. La première étude devrait porter sur les connaissances, les habiletés, les attitudes et les croyances transmises dans les cours d’éducation sexuelle dispensés en milieu scolaire. En fonction de ce point de référence, les systèmes scolaires pourraient évaluer la performance de leur programme d’études respectif. La seconde étude devrait se rattacher à l’établissement d’une base de référence concernant les progrès relatifs à la prévention des problèmes de santé sexuelle et des comportements à risque chez les jeunes. Les rapports permettraient aux ministères de la Santé de mesurer leurs progrès. Dans la troisième étude, on devrait se pencher sur le niveau de satisfaction des élèves et des parents relativement à l’éducation sexuelle et aux services de santé sexuelle offerts aux jeunes, sur les discussions familiales concernant la santé sexuelle, sur la perception du cadre social et physique qui prévaut dans les écoles ainsi que sur d’autres facteurs se rattachant à la santé sexuelle. À la fin, on pourrait transmettre les instruments et les méthodes pertinentes aux arrondissements scolaires, aux services de santé publique et aux écoles, aux fins d’utilisation.

Programme d’études et pédagogie

23. Seul un petit nombre de parents (1,4 p. 100) exercent leur droit de retirer leur enfant des cours d’éducation sexuelle. Le personnel enseignant ne se préoccupe pas tellement du degré d’opposition ou de soutien des parents à l’égard de l’éducation sexuelle.

Cette constatation suggère que malgré la controverse occasionnellement rapportée dans les médias, la plupart des parents, des écoles et des collectivités ne s’attardent pas à la question de savoir si l’éducation sexuelle devrait être une matière obligatoire ou non dans les établissements scolaires.

Dans une étude sur le personnel enseignant du Nouveau-Brunswick, MacKinnon et al. (1994) rapportent que les enseignantes et enseignants jugent élevé le degré d’appui de l’administration. Haignere et al. (1996), après avoir mené une étude similaire aux États-Unis, font remarquer que la plupart des enseignantes et enseignants se montrent à l’aise de dispenser les cours d’éducation sexuelle et ne se laissent pas rebuter par les croyances religieuses, par le manque d’appui de l’administration ni par l’opposition des parents. Les difficultés observées sont :

  • la pauvreté du matériel pédagogique;
  • le manque de temps à l’horaire;
  • le fait que la structure et la gestion des discussions ou du processus soient décousus en salle de classe.

Conséquences

En conséquence, nous proposons de poursuivre des recherches qualitatives plus poussées afin d’en arriver à expliquer pourquoi le personnel enseignant ne couvre pas systématiquement toute la matière nécessaire pour dispenser efficacement les cours d’éducation sexuelle et pourquoi il semble hésiter à utiliser des stratégies d’apprentissage plus dynamiques.

24. L’éducation sexuelle fait presque toujours partie d’un programme scolaire de développement personnel et social, qu’on combine habituellement avec le programme d’information sur les carrières ou d’éducation physique, au niveau secondaire. Plus de 80 p. 100 des arrondissements scolaires rapportent avoir publié pour le premier cycle du secondaire des documents sur les programmes d’éducation pour la santé, d’éducation sexuelle et de prévention du VIH. Les trois quarts du personnel enseignant (71,5 p. 100) disent suivre le programme d’études du ministère. Le quart des infirmières et infirmiers de santé publique soulignent qu’ils ont travaillé avec le personnel des écoles en vue d’aller au-delà du programme prescrit.

Les séances tenues avec les élèves des groupes de discussion formés aux fins de la présente étude ont fait ressortir que la portée et la séquence des cours d’éducation sexuelle présentent sans doute des problèmes. Les élèves estiment que la matière, les activités et le matériel se répètent constamment, année après année. Ils ont une vision large de la sexualité et veulent en comprendre tous les aspects, c’est-à-dire : physiques, émotionnels, psychologiques et sociaux. Mais ils ajoutent que le personnel enseignant a tendance à adopter une vision étroite de la matière pour se concentrer sur les faits, la prévention des maladies, l’anatomie et l’utilisation du condom.

Dans ces circonstances, nous pensons que la constatation présente certaines contradictions par rapport aux critères d’efficacité retenus relativement aux programmes scolaires et à la pédagogie (King et al., 1990; Popham et Hall, sans date, Walsh et Bibace, 1990; Otis, 1996; Association canadienne pour l’éducation à la santé, 1996; Kerr, 1989; Neutins et al., 1991; Santé Canada, 1994). Il faut énoncer clairement les résultats d’apprentissage escomptés, en répondant à la question suivante : Nous attardons-nous uniquement aux connaissances pour laisser tomber les facteurs d’influence comme les attitudes, les croyances, les compétences et la société? On devrait transmettre les messages de prévention du VIH et des MTS dans le cadre d’un programme de saine sexualité, qui ferait partie d’un exhaustif programme d’éducation pour la santé. Mettons-nous l’emphase sur les aspects physiques et négatifs de la sexualité?

Le programme scolaire doit présenter une solide structure. Tenons-nous réellement compte des besoins des élèves? Le temps alloué à l’éducation sexuelle suffit-il à atteindre les résultats d’apprentissage minimum dont il est question dans les rapports de recherche.

La littérature sur la structure pédagogique de l’éducation sexuelle et de l’éducation pour la santé semble refléter les constatations de notre étude.

Ajzenstat et Gentles (1988), qui avaient sondé 245 arrondissements scolaires de quatre provinces du Canada, rapportent que l’éducation sexuelle se dispense normalement dans le cadre d’un programme d’éducation pour la santé. Barrett (1994) signale le même genre de résultats dans son rapport d’étude sur les provinces et les territoires. À la suite d’une enquête effectuée aux États-Unis, Holtzman et al. (1992) montrent que 79,5 p. 100 des arrondissements scolaires planifient et adoptent une approche séquentielle relativement au programme d’éducation pour la santé. Collins et al. (1995) tirent, pour leur part, les données suivantes de la School Health Policies and Programs Study : 92,2 p. 100 des États et 93,7 p. 100 des arrondissements scolaires disposent de lignes directrices ou d’un cadre d’action concernant l’éducation pour la santé. Les cours sur le VIH font presque toujours partie de ces programmes scolaires.

L’évaluation (1996) du processus d’instauration du programme d’éducation pour la santé en Saskatchewan montre que 70 p. 100 du personnel enseignant suit le programme scolaire. En cherchant plus loin toutefois, on note que 30 p. 100 des enseignantes et enseignants ne connaissent pas bien les documents afférents au programme, 50 p. 100 en ont copie, 58 p. 100 y ont recours fréquemment et 31 p. 100 les utilisent à l’occasion.

L’étude de la Saskatchewan renferme les résultats d’un sondage effectué auprès des élèves sur le programme de santé. Ceux-ci se plaignent fréquemment de la redondance des activités pédagogiques. Dans le même ordre d’idées, mentionnons qu’une étude menée en Colombie-Britannique sur le Family Life Education Program (Friesen et al., 1988) indique que les élèves en ont assez de la répétition des données (sans en connaître plus sur la matière).

Conséquences

Plusieurs instances ont combiné ou sont à combiner les cours d’éducation pour la santé et ceux d’éducation sexuelle à ceux d’information sur les carrières, d’éducation physique et d’éducation morale ou religieuse. Les connaissances, les attitudes, les croyances et les compétences en matière de santé et de sexualité survivront-elles à ces nouvelles structures? Restera-t-il une portée et une séquence adéquates et structurées de l’apprentissage escompté en matière de sexualité, de VIH et de MTS?

En conséquence, nous estimons urgent de tirer des travaux de recherche les résultats d’apprentissage appropriés selon l’âge (dont les connaissances, les attitudes, les croyances et les compétences). Dans les provinces et territoires, on devrait se servir de ces résultats de base pour orienter l’élaboration des prochains programmes d’éducation sexuelle ainsi que des programmes pédagogiques y afférents.

25. Une faible partie des ministères de l’Éducation et des arrondissements scolaires appuient énergiquement l’élaboration de programmes scolaires jumelés ou de matériel pédagogique sur le VIH ou la sexualité qui découle d’un effort interdisciplinaire. Moins du tiers affirme soutenir l’élaboration de plans de leçon jumelés ou de matériel didactique avec renvois afin de faciliter pour le personnel enseignant l’intégration des notions sur le VIH et la sexualité à d’autres matières.

La littérature sur la qualité des programmes scolaires et la pédagogie contredit cette constatation. Les élèves devraient avoir l’occasion d’apprendre des notions sur le VIH dans d’autres matières et d’autres cours (Centers for Disease Control, 1997; Association canadienne pour l’éducation à la santé, 1997; Institute of Medicine, 1997). On considère de plus en plus souvent l’apprentissage interdisciplinaire ou fait dans le cadre de projets comme étant un excellent moyen d’apprendre pour les élèves. On devrait y avoir recours pour l’éducation sexuelle (King et Muethen, sans date; Santé Canada, 1994).

Conséquences

Il n’est pas aussi simple que l’on pense d’élaborer du matériel ou des activités pédagogiques jumelés ou interdisciplinaires. On doit d’abord en définir clairement la séquence et la portée dans les deux programmes scolaires jumelés, si on veut planifier adéquatement l’intégration des activités ou du matériel. On doit ensuite s’assurer de la cohérence des activités aux divers niveaux scolaires afin d’éviter les répétitions. Troisièmement, les personnes responsables de la planification des programmes d’études doivent évaluer et planifier le temps requis à cet égard. L’intégration de notions interdisciplinaires au milieu d’un programme ne peut prolonger le temps nécessaire pour donner le cours.

En conséquence, nous proposons d’entreprendre des travaux de recherche sur la meilleure façon d’intégrer les notions sur le VIH et la sexualité dans d’autres matières ou disciplines, dont les sciences, les sciences humaines, les mathématiques, l’éducation morale ou religieuse, le droit, les droits de la personne, les arts et la musique.

26. Le personnel enseignant indique dans ses réponses au questionnaire qu’il utilise des méthodes traditionnelles et magistrales dans les cours d’éducation sexuelle, par exemple : l’exposé magistral, la vidéo, la discussion avec l’ensemble de la classe et les autres méthodes didactiques. Il emploie plus rarement des mécanismes plus dynamiques, comme : le jeu de rôle, la discussion en petits groupes, la mise en scène théâtrale, le journal personnel, l’imagerie et les autres méthodes interactives.

Les travaux de recherche sur l’efficacité des programmes scolaires et la pédagogie font ressortir que le personnel enseignant devrait fréquemment avoir recours à des méthodes dynamiques d’enseignement pour les cours d’éducation sexuelle (Ogletree, 1995; Barnes, 1989; Shannon et McCall, 1990; Cinelli et al., 1994; ministère de l’Éducation de la Saskatchewan, 1991; Santé Canada, 1994; Knight et al., 1990). Notre constatation ne reflète pas du tout ce critère.

Les élèves et les parents ayant participé aux séances de discussion tenues dans le cadre de notre étude estiment qu’on devrait se servir plus souvent de telles méthodes interactives. Ils soulignent qu’on a trop souvent recours à l’exposé magistral, à la vidéo et à la discussion avec l’ensemble de la classe. En Nouvelle-Écosse, les élèves ajoutent que le personnel enseignant modifie rarement l’aménagement de la salle de classe afin de faciliter la discussion.

D’autres rapports d’étude sur le sujet font état de constatations similaires aux nôtres. Par exemple, l’examen fait par Friesen et al. (1988) du Family Life Education Program de la Colombie-Britannique montre que l’ensemble des enseignantes et enseignants se servent de l’exposé-débat pour donner le programme. Qui plus est, c’est le personnel enseignant qui choisit habituellement les sujets de discussion.

Levenson-Gingiss et Basen-Enquist (1994), dans le cadre d’une enquête menée dans l’ensemble de l’État du Texas, rapportent que la majorité des enseignantes et enseignants préfèrent donner un cours magistral, qu’ils sont gênés de passer par le jeu de rôle ou l’exposé par des élèves et qu’ils évitent de montrer comment utiliser un condom ou d’aborder la question de l’homosexualité.

Dans leur enquête effectuée au Nouveau-Brunswick, MacKinnon et al. (1994) constatent que le personnel enseignant utilise souvent la présentation, la discussion avec l’ensemble de la classe et la vidéo mais rarement la mise en scène théâtrale, l’exposé par des élèves, l’informatique ou l’exposé donné par des personnes vivant avec le sida. Ils signalent par ailleurs qu’on fait peu de place à la rédaction d’articles pour le journal étudiant.

L’étude sur le programme d’éducation pour la santé de la Saskatchewan (ministère de l’Éducation, 1996) indique que le personnel enseignant penche pour le modèle de la prise de décision (action sanitaire), mais n’a pas appris à l’instaurer. On y fait également remarquer que les enseignantes et enseignants ont seulement occasionnellement recours à l’excursion, au travail communautaire, à la simulation ou à la rédaction d’un journal personnel.

Beazley et al. (1996), à la suite des séances de discussion en Nouvelle-Écosse, rapportent que les enseignantes et enseignants emploient dans l’ensemble une grande variété de méthodes pédagogiques, mais que chacun utilise en général seulement un nombre restreint de techniques. Les auteurs du rapport signalent par ailleurs que, même si les élèves préfèrent les méthodes interactives, le personnel enseignant n’y a pas recours, à moins que les élèves n’en fassent la demande.

Collins et al. (1995) tirent des observations semblables de la School Health Policies and Programs Study. Ils mentionnent que le personnel enseignant des États-Unis passe habituellement par l’exposé magistral, la discussion avec l’ensemble de la classe, la conférence donnée par une personne adulte et la vidéo.

Munro et al. (1994) soulignent quant à eux que les enseignantes et enseignants ayant reçu une bonne formation peuvent utiliser diverses stratégies pédagogiques, la vidéo et la conférence pour influencer les connaissances, les attitudes et l’intention comportementale des élèves en matière de sexualité. Ainsi donc, il y aurait lieu d’appuyer davantage le perfectionnement professionnel. Doherty-Poirier et al. (1994) font remarquer que la formation en cours d’emploi permet d’influer sur les résultats d’apprentissage des élèves en éducation sexuelle. En effet, si le personnel enseignant reçoit une meilleure préparation, il est en mesure d’agir positivement sur les connaissances, les attitudes et les intentions comportementales des élèves.

D’autres études viennent soulever la question de la façon dont on peut convaincre le personnel enseignant de modifier ses stratégies pédagogiques. Levinson-Gingiss et Basen-Enquist (1994) soulignent que les enseignantes et enseignants sont mal à l’aise avec le jeu de rôle et l’enseignement mutuel. L’évaluation faite par le ministère de l’Éducation de la Saskatchewan (1996) laisse suggérer de donner au personnel enseignant des occasions plus nombreuses de développer ses capacités à utiliser des mécanismes pédagogiques interactifs et complexes. Warren et King (1994), dans leur étude du processus de mise en œuvre du programme Compétences pour des relations saines dans plusieurs instances du Canada, mentionnent que le personnel enseignant aime bien avoir recours à l’enseignement mutuel et à la vidéo une fois qu’il a suivi une formation en cours d’emploi.

Par contre, à la suite de leur examen de deux types de formation en cours d’emploi (autodirigée et guidée), MacKinnon et al. (1994) ne constatent aucun effet sur les méthodes pédagogiques utilisées, sauf que l’approche autodirigée incite les enseignantes et enseignants à mettre une emphase sur l’affirmation de soi dans leurs cours.

Conséquences

En conséquence, nous suggérons de s’appuyer sur les travaux de recherche pour mettre au point, à l’intention de l’ensemble de la profession enseignante, des stratégies de préparation à la multitude de méthodes pédagogiques de nature dynamique. On devrait en outre élaborer et faire part des applications se rapportant directement à l’éducation sexuelle.

27. Le personnel enseignant mentionne rarement trouver des ressources pédagogiques de qualité sur des sujets comme l’orientation sexuelle, la masturbation, le sexe oral et anal et la négociation avec le partenaire sexuel. Peu de ministères de l’Éducation signalent acheter à l’intention des arrondissements scolaires les droits d’auteur ou la licence d’utilisation sur site associée au matériel électronique disponible sur l’éducation sexuelle. Un plus grand nombre de ministères de la Santé (50 p. 100), de services de santé publique (90,5 p. 100) et d’infirmières et infirmiers de santé publique (79,9 p. 100) que de ministères de l’Éducation (36,4 p. 100), d’arrondissements scolaires (63,3 p. 100) ou de directions d’école (73,8 p. 100) disent subventionner ou appuyer la mise au point de matériel pédagogique ou en faire l’achat.

Les constatations du sondage correspondent aux commentaires formulés par les élèves et les parents lors des séances de discussion. Les élèves de tous les groupes de discussion rapportent que les ressources pédagogiques employées sont désuètes. Ils souhaitent visionner des vidéos plus récentes, plus pertinentes et plus réalistes. En Colombie-Britannique, les parents veulent voir une plus grande utilisation d’outils électroniques disponibles dans Internet et de cédéroms.

Ces observations s’apparentent à celles d’autres travaux de recherche. Dans leur étude sur le Nouveau- Brunswick, MacKinnon et al. (1994) mentionnent effectivement que le personnel enseignant juge peu adéquat le matériel utilisé pour les activités pédagogiques sur l’orientation sexuelle, la masturbation, le sexe oral et anal et l'information concernant les personnes atteintes du sida.

Notre recherche nous donne à penser que si on allouait aux enseignantes et enseignants (ceux du groupe autodirigé) le temps requis, ceux-ci seraient en mesure de trouver le matériel pédagogique se rapportant aux sujets mentionnés ci-avant. Il ressort de séances de discussion tenues par Beazley et al. (1996) que le personnel enseignant et les conseillères et conseillers en orientation ont besoin de «dossiers» traitant du matériel et des travaux de recherche pertinents ainsi que de formation en cours d’emploi sur une base régulière.

Dans son évaluation du programme d’éducation pour la santé qui est destiné aux élèves de la 7e à la 9e année, le ministère de l’Éducation de la Saskatchewan (1996) souligne que le personnel enseignant est en mesure d’adapter sa pédagogie de manière à s’appuyer sur d’autres ressources que les manuels scolaires pour donner ses cours. Toutefois, les enseignantes et enseignants insistent toujours sur la nécessité de disposer de ressources mieux adaptées de même que davantage de temps de planification pour pouvoir se familiariser avec ce nouveau matériel. Les auteurs de l’étude en question rapportent que le personnel enseignant souligne que c’est l’accès aux ressources qui joue le plus sur la pédagogie. Comme l’achat et le maintien à niveau du matériel exigent du temps, on éviterait et résoudrait bien des problèmes si le personnel enseignant avait facilement accès à des outils reliés directement au programme d’études.

Small et al. (1995), dans leur analyse de la School Health Policies and Programs Study des États-Unis, signalent que le personnel des services de santé offrent aux enseignantes et enseignants du matériel pédagogique dans la proportion suivante :

  État

(en pourcentage)

District scolaire

(en pourcentage)

Prévention du VIH 816 666
Prévention de la grossesse 449 265

Conséquences

En conséquence, nous proposons de déployer des efforts pour dresser la liste de ces ressources en fonction de l’âge, du niveau scolaire et des résultats d’apprentissage puis de rendre cette liste disponible dans Internet. On devrait également combler toute lacune observée dans la couverture de ces questions délicates ou l’approche, en élaborant du nouveau matériel. Ces efforts devraient s’inscrire dans la stratégie d’ensemble visant les élèves qui présentent peut-être un risque plus élevé par rapport au VIH et aux MTS.

28. Moins de 20 p. 100 des personnes interrogées à tous les paliers des deux systèmes mentionnent subventionner ou appuyer régulièrement l’élaboration de matériel pédagogique à l’intention des élèves gais, lesbiennes ou bisexuels. Un petit nombre signalent avoir adapté ce matériel pour les élèves autochtones, des minorités ou aux prises avec une incapacité.

Les élèves du groupe de discussion du Québec ont l’impression qu’on leur demande de tenir leur sexualité sous silence lors des discussions sur l’orientation sexuelle en classe, ou qu’on les incite à le faire.

Après avoir examiné la littérature sur les jeunes hommes gais, Santé Canada (1996) signale qu’on reconnaît rarement l’homosexualité dans le programme d’études et le matériel pédagogique. On s’attarde souvent aux questions comme la grossesse et la procréation dans les cours d’éducation sexuelle. On ne met pas non plus en valeur la contribution des gais ou lesbiennes dans les cours d’histoire, d’arts et autres.

Cette observation reflète les résultats des quelques études ou évaluations réalisées sur les outils pédagogiques destinés à ces segments de la population étudiante. Dans l’évaluation du programme d’éducation pour la santé en Saskatchewan (ministère de l’Éducation, 1996), on signale que les ressources pédagogiques offrant une perspective autochtone ou métis sont pratiquement inexistantes à l’échelle de l’école et de l’arrondissement scolaire. On fait par ailleurs ressortir le besoin d’aider le personnel enseignant à intégrer ce genre de matériel dans les cours.

Conséquences

En conséquence, nous suggérons que les systèmes scolaires, de santé publique et autres s’attardent à l’identification, à l’énumération et à la dissémination du matériel pédagogique adapté aux besoins des élèves gais, lesbiennes et bisexuels.

29. Les enseignantes et enseignants ayant répondu au sondage rapportent couvrir davantage certains sujets que d’autres dans les cours d’éducation sexuelle. Ils se sentent moins certains de leurs compétences pour enseigner ces sujets et jugent que les ressources disponibles pour traiter de ces sujets particuliers se révèlent moins adéquates que d’autres. Les sujets en question sont : l’orientation sexuelle, le sexe oral et anal, la commercialisation du sexe, la pornographie ainsi que le plaisir et la satisfaction sexuelle.

Cette constatation reflète les points de vue exprimés par les élèves et les parents dans les séances de discussion. Les élèves disent qu’on couvre en profondeur dans leurs cours d’éducation sexuelle des sujets comme l’anatomie, le sida, la contraception, les condoms et le rôle parental mais beaucoup moins bien les questions comme l’abus, l’orientation sexuelle, les émotions et les sentiments. Les parents des groupes de discussion souhaitent pour leur part qu’on insiste davantage sur la contraception, l’abstinence, l’intimité, l’éthique sexuelle, la négociation, la prise de décision et l’influence des médias.

La recherche sur l’efficacité des programmes scolaires et de la pédagogie montre qu’il faudrait appuyer et encourager une disposition favorable chez le personnel enseignant par rapport à la sexualité (Hamilton et Levenson-Gingiss, 1989; Popham et Muethen, sans date; Shannon et McCall, 1990; Friesen et al., 1989; Santé Canada, 1994). Il importe que soit couverte en détail toute la matière relative à la sexualité, si on veut assurer l’efficacité des programmes scolaires et de la pédagogie.

Eisenberg et al. (1997) rapportent, dans une étude auprès de groupes de discussion du Minnessota, que les élèves désirent voir le personnel enseignant donner des renseignements plus détaillés, aborder les «vraies» questions, mettre plus d’emphase sur l’éducation sexuelle en général, faire davantage preuve d’ouverture et utiliser des méthodes pédagogiques plus dynamiques. Ils veulent qu’on parle davantage de l’orientation sexuelle, de l’avortement, des contraceptifs, des endroits où aller chercher de l’aide, des options en cas de grossesse, de la violence sexuelle, des façons de communiquer avec les parents et de la prise de décision. Ils souhaitent aussi l’intégration dans leurs cours des valeurs et des aspects émotifs reliés à la sexualité. Ils veulent enfin que l’éducation sexuelle débute plus tôt et qu’on répète moins souvent la matière.

Dans une étude similaire avec des groupes de discussion en Nouvelle-Écosse (Planned Parenthood, 1996), on rapporte que les élèves aimeraient qu’on mette moins d’emphase sur l’information factuelle et plus sur l’orientation sexuelle, le matériel récent et les questions délicates.

Un article controversé à paraître dans la revue de l’American Medical Association fait ressortir l’importance de couvrir la matière plus en profondeur et de faire preuve d’ouverture dans les cours d’éducation sexuelle. L’article rapporte que 58 p. 100 de la population américaine considère le sexe oral comme ne constituant pas un rapport sexuel.

Nos résultats correspondent à ceux d’autres études effectuées sur les notions abordées parmi les sujets délicats se rattachant à l’éducation sexuelle. Forest et Silverman (1989) rapportent, après avoir mené une enquête auprès du personnel enseignant de la 7e à la 12e années, l’écart existant entre ce qu’on estime devoir enseigner et ce qui est en fait abordé. Ils montrent que seulement un petit nombre d’enseignantes et enseignants traitent de l’homosexualité, des pratiques sexuelles à risques réduits, de l’avortement et de la contraception. Ogletree et al. (1993) notent, après avoir choisi puis analysé 23 programmes d’éducation sexuelle disponibles chez des éditeurs commerciaux ou à but non lucratif, le pauvre traitement fait des sujets délicats, comme l’image corporelle, l’orientation sexuelle, la prévention des MTS et l’exploitation sexuelle.

Friesen et al. (1988) mentionnent que les élèves et les parents à la fois se montrent inquiets de la plus grande place faite aux maladies qu’aux comportements sexuels et à la saine sexualité. Ils ajoutent que tant les élèves que les enseignantes et enseignants se sentent mal à l’aise de discuter des questions délicates par rapport à la sexualité.

MacKinnon et al. (1994) font observer que les directions d’école incitent son personnel à dresser des plans de leçon et à couvrir de la matière reliés aux faits médicaux plutôt qu’aux sujets délicats. Dans leur rapport d’étude sur le Nouveau-Brunswick, ils signalent que le personnel enseignant traite exhaustivement des fréquentations, de l’abstinence, du dialogue, des MTS, des comportements à risque, des condoms et du VIH pour mettre un peu de côté les sujets comme l’orientation sexuelle, le sexe oral et anal ainsi que les répercussions sociales quand on contracte le VIH ou le sida. Ils mentionnent en outre que les enseignantes et enseignants se sentent habituellement à l’aise de traiter du VIH tant avant qu’après avoir suivi une formation en cours d’emploi.

Une étude réalisée par les Centers for Disease Control (1994) ne contient aucune mention à l’égard des sujets de nature délicate dont il a été question précédemment. Elle fait par contre état d’une chute drastique du temps accordé à la démonstration du condom et aux tests de VIH. Collins et al. (1995) rapportent, à la suite d’une analyse de la School Health Policies and Programs Study des États-Unis, que le personnel enseignant signale traiter en profondeur de certains sujets dans la proportion suivante :

  • motivation à l’abstinence (76,2 p. 100);
  • prévention des MTS (74,7 p. 100);
  • fréquentations et relations (69 p. 100);
  • risques associés aux partenaires multiples (68,9 p. 100);
  • influences sociales (68 p. 100);
  • système reproducteur (67,2 p. 100).

Les mêmes auteurs mentionnent par ailleurs qu’on s’attarde moins à d’autres sujets dans la proportion suivante :

  • accès aux services concernant les MTS (55,5 p. 100);
  • contraception (53,7 p. 100);
  • mariage (50,2 p. 100);
  • importance du risque chez les adolescentes et adolescents (50,1 p. 100).

Beazley et al. (1996) font savoir quant à eux que le personnel enseignant couvre une pléïade de sujets, mais chacun à un degré différent. Ils notent que le fait d’aborder les sujets délicats dépend des questions des élèves ou de l’intérêt de l’enseignante ou de l’enseignant. Langille et al. (sans date), à la suite d’un sondage auprès d’une collectivité rurale de la Nouvelle-Écosse, signalent que 95 p. 100 des parents sont d’accord pour qu’on dispense des cours d’éducation sexuelle en milieu scolaire et que 72 p. 100 souhaitent que cet enseignement se fasse de la maternelle à la 12e année.

Langille et al. poursuivent en soulignant que les parents appuient énergiquement l’enseignement des sujets délicats, comme le démontre les chiffres suivants : contraception (91 p. 100); comportements sexuels (79 p. 100); orientation sexuelle (70 p. 100); abus et agression (93 p. 100). Cet appui diminue considérablement quand on parle d’enseigner ces sujets aussi tôt qu’en 8e et 9e années, comme l’indiquent les données suivantes : comportements sexuels (58 p. 100), amour et intimité (39 p. 100); rôle parental à l’adolescence (37 p. 100); orientation sexuelle (27 p. 100) et avortement (18 p. 100).

McKay (1996) note, dans un rapport d’étude sur les parents du milieu rural de l’Ontario, que la majorité des parents (plus de 58,9 p. 100) approuvent l’intégration des sujets suivants dans le programme d’éducation sexuelle : orientation sexuelle, contraception, violence, abstinence, prévention du VIH et des MTS, fréquentations, abus et viol, procréation et puberté.

MacKinnon et al. (1994) font observer que le personnel enseignant ne se perçoit pas comme possédant les compétences requises pour traiter de la masturbation, de sexe oral et anal et des influences sociales. Ils soulignent du reste que deux types de formation en cours d’emploi (ateliers avec des spécialistes ou la formation autodirigée) peuvent élargir l’étendue de la matière couverte par le personnel enseignant de même que rehausser leur confiance en leur capacité. Chen et al. (1990) ajoutent qu’un programme de formation sur place et l’appui nécessaire peuvent modifier l’assurance et les points de vue du personnel enseignant à l’égard de la prestation des cours d’éducation sexuelle.

Conséquences

En conséquence, nous estimons que les stratèges devraient s’intéresser au processus de dissémination du matériel pédagogique et qu’on devrait entreprendre des recherches qualitatives afin de comprendre les barrières auxquelles se heurtent les enseignantes et enseignants quand vient le temps d’enseigner des sujets comme l’orientation sexuelle, le sexe oral et anal, le plaisir et la satisfaction, la pornographie, la prostitution et le Code criminel.

30. Presque un cinquième (19,3 p. 100) des enseignantes et enseignants signalent n’avoir reçu aucune formation en cours d’emploi concernant l’éducation sexuelle et 39,8 p. 100, avoir participé à un atelier sur l’application du programme d’éducation sexuelle. Les personnes interrogées dans le cadre de la présente étude possèdent en moyenne 14,6 ans d’expérience en enseignement, dont 8,7 ans en enseignement de cours liés à la santé. Elles ont enseigné 19,2 fois un segment sur l’éducation sexuelle et 13,9 fois un segment sur le VIH/sida. L’expérience diffère cependant de façon considérable. Environ 15 p. 100 du personnel enseignant dispense le programme pour la première fois.

Notre observation reflète celle découlant d’autres études. En outre, les travaux de recherche sur la qualité de la pédagogie font ressortir la cruciale importance de fournir régulièrement et systématiquement de la formation en cours d’emploi (Harvet-Berinio et al., 1998; MacKinnon et al., 1994; Levinson-Gingiss et Hamilton, 1989; Centers for Disease Control, 1988; Telljohan et al., 1996; Arcius, 1979; Shannon et McCall, 1990). Ceci donne à penser que les systèmes ne tiennent pas tous compte de ce critère. Cette conclusion concernant la formation interne et l’expérience des enseignants est semblable à celle d’autres études

MacKinnon et al. (1994) rapportent que le personnel enseignant du Nouveau-Brunswick possède énormément de connaissances générales sur le VIH/sida mais qu’il montre certaines lacunes, comme en ce qui a trait à la compréhension des comportements sexuels à risque.

Dans l’étude du ministère de l’Éducation de la Saskatchewan (1996), on signale ce qui suit : 41 p. 100 des enseignantes et enseignants des cours d’éducation pour la santé au premier cycle du secondaire ont participé à des ateliers sur la question, 32 p. 100 ont assisté en 1987 à un atelier sur la mise en œuvre du programme d’études; 18 p. 100 ont pris part en 1990 à un atelier concernant le segment sur la sexualité du programme d’études, et 19 p. 100 ont suivi plus de deux ateliers sur l’éducation pour la santé. On recommande par ailleurs que le ministère de l’Éducation et les arrondissements scolaires reconnaissent le besoin de continuellement garder à jour les connaissances et les compétences du personnel enseignant.

Collins et al. (1995) notent que le personnel enseignant aux États-Unis possède à peu près le même degré d’expérience et de formation en cours d’emploi que ses homologues du Canada. Ils donnent les chiffres suivants : 38 p. 100 des enseignantes et enseignants ont reçu une formation sur place sur la prévention du VIH au cours des trois dernières années; 17 p. 100, sur la sexualité; 8,4 p. 100, sur la prévention de la grossesse et 21,3 p. 100, sur la prévention des MTS. Les deux tiers dispensent des cours d’éducation pour la santé depuis plus de cinq ans.

Conséquences

En conséquence, nous proposons que les stratèges considèrent des stratégies peu coûteuses pouvant permettre de fournir au personnel enseignant une meilleure formation en cours d’emploi et ce, sur une base régulière. La formule pourrait consister en ce qui suit : la mise en commun des ressources, la formation à distance, l’obtention de l’appui d’entreprises et la collaboration étroite avec les organismes communautaires.

31. La plupart des personnes interrogées dans les milieux de l’éducation et de la santé n’encouragent pas systématiquement la participation des parents à l’éducation sexuelle par l’entremise de devoirs et d’activités à la maison. En effet, 36,4 p. 100 des ministères de l’Éducation, 42 p. 100 des arrondissements scolaires, 30,5 p. 100 des directions d’école, 8,3 p. 100 des ministères de la Santé et 14 p. 100 des services de santé publique soulignent donner ce genre d’encouragement. Pourtant, la majorité des enseignantes et enseignantes disent ne pas impliquer les parents dans ces activités pédagogiques. Moins de la moitié des répondantes et répondants de tous les paliers des deux systèmes font savoir qu’ils publient de l’information ou organisent des ateliers à l’intention des parents sur une base régulière.

Cette observation reflète les points de vue exprimés par les parents des groupes de discussion formés aux fins de la présente étude. Les parents de tous les groupes mentionnent ne pas en savoir assez sur les cours de sexualité dispensés à leurs enfants. En Colombie-Britannique, on suggère de publier un guide ou un manuel à l’intention des parents. On propose par ailleurs de tenir des consultations auprès des parents au sujet du programme. Le comité de parents de l’école devrait s’occuper de distribuer un sondage afin de connaître l’opinion de tous les parents. En Nouvelle-Écosse, on s’intéresse aux ateliers parents-jeunes organisés par les spécialistes de la santé publique de la collectivité. Les élèves des groupes de discussion du Québec déconseillent d’obliger les élèves à faire ce genre d’activités d’apprentissage à la maison.

La constatation ci-avant correspond également aux autres travaux de recherche effectués sur la participation parentale dans le processus éducatif.

Fullan (1991) et d’autres insistent sur la valeur de l’implication parentale dans les programmes scolaires et le processus d’apprentissage. À cet égard toutefois, il faut tenir compte de toutes les barrières sociales, psychologiques, professionnelles et pratiques. Dans leur rapport sur l’instauration du programme Compétences pour des relations saines, Warren et King (1994) soulignent la difficulté de faire intervenir les parents dans le module d’apprentissage à la maison, qui fait partie du programme. Par contre, si on fait tomber les barrières, les activités se révèlent efficaces en plus d’être appréciées par les parents.

MacKinnon et al. (1994) font en outre observer que la plupart des enseignantes et enseignants possèdent peu d’expérience quand vient le temps d’engager les parents dans le processus d’apprentissage associé aux programmes d’éducation sexuelle. Brock et Beazley (1995) font état des obstacles qui découlent de la participation parentale en soulignant la pauvreté des stratégies de communication utilisées par les écoles pour atteindre les parents ainsi que le degré d’incertitude (croyances par rapport à la santé) exprimé par les parents quant à leur capacité à discuter adéquatement de sexualité avec leurs enfants.

Beazley et al. (1996), à la suite de séances de discussion, rapportent que les élèves souhaitent qu’on incite leurs parents à leur parler de sexualité mais qu’on ne rende pas obligatoires les activités d’apprentissage à la maison. Dans une étude effectuée en région rurale au Texas, Colwell et al. (1995) signalent que les parents considèrent la sexualité comme étant le sujet le moins important à soulever avec leurs enfants, parmi une dizaine d’autres.

L’évaluation commandée par le ministère de l’Éducation de la Saskatchewan concernant son programme d’éducation pour la santé montre que seulement 10 p. 100 des administrations scolaires disent que les parents participent activement au programme. Le gros de la contribution concerne l’aide fournie par les parents pour que leurs enfants atteignent leurs objectifs d’action sanitaire, qui fait partie du module de planification et de prise de décision du programme.

La School Health Policies and Programs Study des États-Unis fait nettement contraste aux résultats du Canada. Collins et al. (1995) rapportent effectivement que 75,2 . 100 des enseignantes et enseignants des cours d’éducation pour la santé passent par des activités familiales dans le cadre de leur programme scolaire.

L’Association canadienne pour l’éducation à la santé (1996), après un examen de la littérature sur l’intervention parentale dans le programme d’éducation pour la santé, suggère dix étapes que peuvent facilement suivre les écoles. Il s’agit notamment de diverses méthodes à utiliser pour communiquer avec les parents, d’explications sur les façons et les moments de faire intervenir les parents ainsi que de la mobilisation des services de santé publique et des organismes communautaires.

Conséquences

En conséquence, nous suggérons de faire la liste et la description des activités qui réussissent efficacement à faire intervenir les parents dans le programme d’éducation sexuelle puis de disséminer cette information. Nous proposons par ailleurs de dresser la liste ou de mettre au point du matériel de bonne qualité qui aiderait les parents à aborder la question de la sexualité avec leurs enfants. Ce matériel devrait dépasser les propos d’ordre général pour couvrir des sujets comme l’orientation sexuelle, le viol commis par une connaissance et la contraception. On devrait par la suite disséminer ces ressources en milieu scolaire.

32. La majorité des personnes interrogées dans les systèmes scolaires et de santé publique signalent ne pas encourager ni suivre l’engagement d’organismes communautaires dans les programmes d’éducation sexuelle en milieu scolaire. Environ le tiers des ministères de l’Éducation, des arrondissements scolaires et des directions d’école signalent inciter les écoles à travailler avec des groupes s’intéressant au sida ou à la sexualité. Même si les deux tiers des ministères de la Santé disent subventionner la collaboration de ces groupes avec les écoles, seulement le tiers des infirmières et infirmiers de santé publique rapportent coopérer avec des groupes communautaires dans le cadre de leurs activités en milieu scolaire. La majeure partie des enseignantes et enseignants (74,5 p. 100) signalent que le personnel de la santé publique vient donner un exposé dans leur classe dans moins de 10 p. 100 des cas. Pourtant, 70,9 p. 100 des infirmières et infirmiers de santé publique mentionnent se rendre régulièrement en salle de classe pour faire une présentation devant les élèves. De surcroît, 78,7 p. 100 du personnel enseignant affirme ne jamais avoir demandé à une personne vivant avec le VIH/sida de venir donner une conférence en classe, et 15,9 p. 100 déclare l’avoir fait dans moins de 10 p. 100 des cas. Aucun des ministères de l’Éducation ne rapporte surveiller systématiquement le degré d’implication des parents, des élèves ou du milieu communautaire dans l’éducation sexuelle.

Faire entrer en jeu les organismes communautaires en ce qui a trait à l’éducation sexuelle constitue un autre critère d’efficacité se rapportant à la pédagogie (Perry et al., 1989; Centers for Disease Control, 1988; Popham et Hall, sans date; Santé Canada, 1994; Brock et Beazley, 1995; Hahn, 1996; Werch et al., 1991).

Une étude réalisée par la Planned Parenthood Federation of Nova Scotia (1996) montre que les élèves trouvent les conférences efficaces, plus agréables et plus appropriées. Scollay et al. (1992) notent que les témoignages de personnes vivant avec le sida peuvent aider les élèves à s’approprier le risque associé au VIH. Les jeunes ont tendance à prendre davantage de risques dans leurs comportements sexuels s’ils ne perçoivent pas ce risque.

Les résultats de ces études correspondent sensiblement aux points de vue exprimés par les élèves et les parents des groupes de discussion. En général, les élèves souhaitent entendre des conférencières et des conférenciers de la collectivité, particulièrement les personnes ayant vécu avec un problème d’ordre sexuel ou de santé. Les élèves des groupes de discussion du Québec sont soucieux de savoir si les personnes invitées respecteront le caractère confidentiel et privé des discussions.

Les parents de la Nouvelle-Écosse, dont plusieurs spécialistes de la santé, estiment qu’on devrait demander plus souvent l’opinion de la collectivité concernant le contenu du programme d’éducation sexuelle.

La School Health Policies and Programs Study des États-Unis (Small et al., 1995) contient un commentaire au sujet de la participation du personnel des services de santé aux cours d’éducation pour la santé. En effet, 66,7 p. 100 des infirmières et infirmiers affirment avoir pris part à de tels cours, ce qui correspond aux réponses obtenues des infirmières et infirmiers de santé publique dans le cadre de la présente étude.

Conséquences

En conséquence, nous suggérons de prendre plus souvent avantage, dans la mesure du possible, des ressources et des organismes communautaires en vue d’appuyer l’éducation sexuelle en milieu scolaire.

33. Moins du quart des personnes interrogées à tous les paliers des systèmes scolaires et de santé publique affirment appuyer systématiquement les activités de promotion de la santé organisées par les jeunes, comme les programmes d’entraide étudiant en matière de santé sexuelle. Cette observation s’applique tant aux groupes d’élèves dans les écoles qu’aux groupes communautaires de jeunes.

Les études montrent que les amis sont souvent les premières personnes vers lesquelles se tournent les jeunes pour poser des questions d’ordre sexuel (King et al. 1988; Planned Parenthood, 1996). À la suite d’une enquête sur l’incidence d’un programme d’entraide étudiant mis en place dans une école secondaire, Caron et Otis (1996) rapportent que les élèves améliorent leurs connaissances sur le VIH et la sexualité, ont davantage le goût d’utiliser un condom et sont plus favorables à l’abstinence.

Warren et King (1996) signalent, dans leur rapport sur les capacités associées au programme Compétences pour des relations saines, le besoin d’entreprendre de plus amples recherches sur le concept de l’apprentissage par les pairs dans le cadre du programme d’éducation sexuelle. On peut trouver maintes preuves à cet égard dans l’abondante littérature sur l’influence positive des programmes d’entraide étudiant sur d’autres problèmes sociaux et de santé (Carr, 1996; Shannon et McCall, 1997; Centers for Disease Control, 1988; Santé Canada, 1994; Warren et King, 1994; O’Hara et al., 1996).

La School Health Policies and Programs Study indique que les écoles des États-Unis utilisent sans doute plus souvent ce genre de stratégie. Collins et al. (1995) notent que 30,9 p. 100 des enseignantes et enseignants demandent à des jeunes de donner des conférences dans leurs cours d’éducation pour la santé et 24,5 p. 100 intègrent des devoirs reliés à la santé à l’intérieur de leur programme pédagogique. En outre, 61 p. 100 des écoles forment des élèves à jouer le rôle de guide auprès de leurs condisciples.

Toutefois, en ce qui concerne la promotion de la santé réalisée par les jeunes, les différences relevées entre la School Health Policies and Programs Study des États-Unis (qui porte sur l’éducation pour la santé) et notre étude sur l’éducation sexuelle laissent peut-être simplement entendre que le personnel enseignant n’a pas aussi souvent recours à ce genre de stratégie pour les cours d’éducation sexuelle.

Conséquences

En conséquence, nous estimons qu’il y aurait lieu d’effectuer des recherches et de mettre au point des ressources afin d’appuyer en milieu scolaire les programmes d’entraide étudiant et les programmes d’enseignement mutuel relatifs à la santé sexuelle, au VIH et aux MTS.

Services préventifs de santé

34. Les deux tiers des ministères de la Santé (66,7 p. 100) et la moitié des services de santé publique (56,8 p. 100) affirment promouvoir régulièrement ceux qui sont exemplaires parmi les politiques et les programmes de santé sexuelle destinés aux adolescentes et adolescents. Moins de la moitié (41,7 p. 100) des ministères de la Santé et la plupart des services de santé publique (82,1 p. 100) rapportent faire de la publicité sur les services de santé sexuelle disponibles pour les jeunes. Environ la moitié (48,6 p. 100) des directions d’école affirment revoir périodiquement avec leur personnel les procédures à suivre pour aiguiller les élèves vers les services de santé. Enfin, 16,7 p. 100 des ministères de la Santé et 41,7 p. 100 des services de santé publique mentionnent contrôler la prestation des services de santé sexuelle fournis aux jeunes à l’aide de sondages ou d’évaluations périodiques.

Les travaux de recherche sur la qualité de la prestation des services préventifs en santé sexuelle offerts aux adolescentes et adolescents mettent en lumière ce qui suit :

  • les services de santé sexuelle destinés aux jeunes doivent être facilement accessibles et mettre l’emphase sur la prévention (Santé Canada, sans date; Oickle et Mackie, 1996; Organisation mondiale de la santé, 1998; Association médicale canadienne, 1995; Laboratoire de lutte contre la maladie, 1998; Martin, 1996; Association canadienne de santé publique, 1993);
  • les spécialistes des milieux de l’éducation et de la santé doivent clairement comprendre le processus d’aiguillage (Thomas et Texidor, 1987; American Association for Counseling and Development et al., 1990; Organisation mondiale de la santé, 1997);
  • on doit offrir une gamme complète de services (information, filtrage, conseils, tests et traitement) (Mitka, 1979; Laboratoire de lutte contre la maladie, 1998; Association canadienne de santé publique, 1993; Institute of Medicine, 1997);
  • on doit promouvoir les services de santé auprès de la jeunesse et des milieux scolaires (Laboratoire de lutte contre la maladie, 1998; American Association for Counseling and Development et al., 1990; Baskerville, 1991).

Aux États-Unis, la Institute of Medicine (1997) fait état et traite de plusieurs études de cas démontrant l’efficacité des services préventifs de santé dispensés en milieu scolaire ou à proximité. Son rapport contient des recommandations dans lesquelles on souligne l’importance de mener des recherches sur l’organisation, la gestion, l’efficacité et la rentabilité des services additionnels offerts dans les écoles.

Santé Canada (sans date) explique comment on doit réorienter les services de santé ainsi que les spécialistes y travaillant afin de renforcer la prévention. Ceci devrait inciter les médecins à modifier leurs pratiques cliniques et à coopérer davantage avec les écoles. En outre, le personnel de la santé publique pourrait passer par le milieu scolaire pour fournir un plus grand nombre de services préventifs aux jeunes au lieu de simplement dispenser des services de traitement en clinique communautaire. Bell et Joly (1997) rapportent que le Canada obtient des résultats variables dans le renforcement de l’aspect préventif des services de santé.

À la suite d’une évaluation de cliniques de santé sexuelle installées dans les écoles, Baskerville et al. (1991) signalent ce qui suit :

  • ces cliniques attirent une clientèle déjà active sexuellement;
  • elles n’incitent pas les jeunes à multiplier leurs activités sexuelles;
  • les élèves sont satisfaits des services;
  • on pourrait les améliorer en les reliant à un réseau de guides ayant reçu une formation ainsi qu’en faisant la publicité des services disponibles.

L’enquête effectuée auprès de 220 jeunes de la Nouvelle-Écosse par la Planned Parenthood (1996) montre que près d’un tiers de la jeunesse interrogée affirme ne pas avoir accès à des services de santé sexuelle.

Orton et Rosenblatt (1982) indiquent, dans un rapport d’enquête sur les cliniques de santé offrant des services aux jeunes en milieu communautaire, que le taux de grossesse chez les adolescentes chute si :

  • plus d’une clinique de la collectivité fournit des services de planification familiale;
  • on ne place aucune limite sur les services pouvant être offerts aux jeunes;
  • on a dispensé des cours d’éducation sexuelle avant la 11e ou 12e année.

Conséquences

En conséquence, nous proposons de réaliser des études qualitatives afin d’identifier et de décrire les mesures à prendre pour rehausser et étendre la prestation des services préventifs en santé sexuelle qui sont offerts aux adolescentes et adolescents.

35. La majorité des ministères de la Santé (83,3 p. 100) subventionnent habituellement la prestation des services préventifs en santé sexuelle ainsi que la prestation de ces services par les groupes œuvrant dans les domaines de la sexualité et du sida. Pour les services de santé publique, les proportions à cet égard sont de 68,2 p. 100 et de 25,6 p. 100. En outre, 41,7 p. 100 des ministères de la Santé et 54,5 p. 100 des services de santé publique affirment fournir directement dans les écoles des services de santé sexuelle.

Les travaux de recherche sur l’efficacité de la prestation des services préventifs de santé laissent supposer que les groupes communautaires devraient recevoir des fonds pour dispenser ces services (Organisation mondiale de la santé, 1997; Association canadienne de santé publique, 1993). D’ailleurs, la jeunesse devrait avoir facilement accès aux services ce qui l’amènerait à y avoir recours (Kirby et al., 1993; Keyl et al., 1996; Weathersby et al., 1995; Organisation mondiale de la santé, 1997; Dryfoos, 1985; Chen et al., 1990).

En général, les élèves et les parents de tous les groupes de discussion souhaitent que les services préventifs en santé sexuelle soient faciles d’accès pour les jeunes. Les élèves ajoutent qu’ils veulent pouvoir obtenir ces services à l’école, parce qu’ils sont moins enclins à passer par des cliniques communautaires. En Colombie-Britannique, les élèves s’opposent à ce que ces services soient offerts par des groupes communautaires. Les parents de la Nouvelle-Écosse pensent que leurs enfants n’iraient pas dans des cliniques communautaires en raison des difficultés de transport dans leur milieu rural et de la gêne par rapport aux cliniques. Les élèves de cette province soulignent qu’ils seraient mal à l’aise de poser des questions sur la santé sexuelle au pharmacien ou à la pharmacienne.

Notre observation correspond à celles d’autres études. Weathersby et al. (1995) notent que les parents et les élèves désirent que soient offerts dans les écoles une gamme complète de services de santé, dont des services en santé sexuelle. L’analyse de Small et al. (1995) concernant la School Health Policies and Programs Study fait ressortir que 59,2 p. 100 des États américains subventionnent des cliniques en milieu scolaire ou à proximité. On y mentionne aussi qu’il existe au moins une clinique dans une école dans 11,5 p. 100 des arrondissements scolaires. De plus, on y signale que 28,6 p. 100 des écoles du premier cycle du secondaire et 38,2 p. 100 des écoles du second cycle dispensent des services de prévention de la grossesse et de planification familiale. On y rapporte enfin que 57,3 p. 100 des établissements scolaires aux États-Unis ont au moins une infirmière ou un infirmier à leur emploi.

Zeanatz et al. (1996) ont examiné l’expérience des cliniques de santé en milieu scolaire qui offrent des services de santé sexuelle. Ils notent des problèmes de controverse quand les responsables de ces cliniques diminuent ou outrepassent l’autorité parentale. Les cliniques efficaces s’appuient sur le soutien des parents pour promouvoir leurs services.

Conséquences

En conséquence, nous suggérons de mener de plus amples recherches afin de déterminer la rentabilité et les avantages-coûts de la prestation de services de santé aux adolescentes et adolescents en milieu scolaire ou à proximité.

36. La majeure partie des ministères de la Santé (75 p. 100) et des services de santé publique (71,5 p. 100) déclarent fournir de l’aide afin que soient adaptés les services préventifs en santé sexuelle de manière à combler les besoins des adolescentes et adolescents.

Cette observation va à l’encontre des points de vue exprimés par les élèves et les parents pendant les séances de discussion. Seulement deux élèves affirment avoir déjà eu recours à des services préventifs en santé sexuelle. L’un a vécu une expérience positive, et l’autre, une négative. La plupart des élèves se sentent mal à l’aise d’utiliser ces services. Les parents du groupe de discussion de la Nouvelle-Écosse se soucient du respect du caractère confidentiel des services fournis dans leur milieu rural.

Semble refléter ces opinions une étude effectuée par la Nova Scotia Planned Parenthood Federation (1996) auprès de 220 élèves. D’après le rapport, les élèves se prévalant de ces services signalent que le non-respect du secret professionnel et l’attitude de leurs parents les découragent de se rendre dans les cliniques. On laisse entendre ensuite que pour adapter les services aux adolescentes et adolescents, les cliniques devraient prendre les mesures suivantes : 1) susciter l’acceptation, 2) donner aux jeunes le sentiment d’être bienvenus, 3) parler aux jeunes de la peur, 4) faciliter l’accès aux services, 5) ne pas porter de jugements sur la jeunesse, 6) encourager le soutien parental, 7) fournir un endroit privé où obtenir des condoms, 8) éduquer les parents, 9) accepter la réalité de la sexualité des adolescentes et adolescents, 10) s’ouvrir et dialoguer.

La littérature sur l’efficacité de la prestation des services de santé sexuelle aux adolescentes et adolescents fait ressortir l’importance d’adapter les services aux besoins de la jeune clientèle (Blum et al., 1996; Laboratoire de lutte contre la maladie, 1998; Association for Counseling and Development et al., 1990; Santé Canada, 1994; Dryfoos, 1985; Cohen, 1991).

Conséquences

En conséquence, nous suggérons d’entreprendre dans diverses collectivités et auprès de différentes clientèles des études de cas plus approfondies afin de voir quelles autres modifications il y aurait lieu d’apporter aux services de santé sexuelle. Il faudrait aussi mener une enquête de grande échelle auprès des adolescentes et adolescents afin de connaître leur opinion, leurs préférences et leur degré de satisfaction relativement aux services de santé sexuelle et aux cours d’éducation sexuelle reçus.

37. Environ la moitié des ministères de la Santé (58,3 p. 100) et des services de santé publique affirment avoir adapté la prestation des services préventifs de santé de manière à remplir les besoins des jeunes gais, lesbiennes et bisexuels. Les deux tiers des ministères de la Santé (66,7 p. 100) et seulement 37,5 p. 100 des services de santé publique disent avoir fait le même genre d’adaptation pour les jeunes Autochtones, des minorités ou aux prises avec une incapacité.

Il importe de tenir compte de certains facteurs particuliers si on veut adapter adéquatement les services préventifs en santé sexuelle (Santé Canada, 1989; American Association for Counseling and Development et al., 1990; Schneider et Tremble, 1986; Paroski, 1987; Russell, 1989), c’est-à-dire en renforcer le caractère confidentiel et offrir de la formation en cours d’emploi au personnel.

Paroski (1987) note, à la suite d’une étude auprès de 121 jeunes personnes homosexuelles de la ville de New York, que sans appui parental, modèle de comportement ni aide de guides de leur âge, bon nombre des jeunes gais s’en remettent aux expériences sexuelles pour faire leur apprentissage de la sexualité. Il estiment que les fournisseurs de soins de santé doivent se sensibiliser au sentiment d’isolement, à la mise sous silence de la sexualité et aux conflits caractérisant le style de vie de cette population. Le perfectionnement professionnel devrait couvrir l’ouverture d’esprit, les connaissances particulières se rattachant aux facteurs sociaux et psychologiques de même que les techniques d’aiguillage pour les jeunes et les groupes de soutien aux familles.

Notre observation s’apparente à celles ressortant d’un examen de la littérature effectué par Santé Canada (1996). Dans ce dernier rapport, on signale effectivement que les organismes de santé et de services sociaux n’adaptent pas leurs activités aux jeunes gais, lesbiennes et bisexuels. On mentionne de surcroît qu’un examen des programmes relatifs au sida a permis de constater que les jeunes gais n’ont accès à aucune ressource.

Un rapport d’étude de l’Association canadienne de santé publique (1998) fait état des subventions insuffisantes et sporadiques allouées aux services de santé destinés aux jeunes gais, lesbiennes et bisexuels. Il montre également que cette clientèle ne se tourne pas vers les organismes communautaires pour aller chercher de l’aide.

Russell (1989) estime que les responsables de l’orientation en milieu scolaire peuvent prévenir le VIH chez les jeunes gais en accomplissant ce qui suit :

  • changer d’attitude et de méthodes;
  • éduquer le personnel enseignant au sujet de l’homosexualité;
  • alléger l’effet des réactions homophobes.

Schneider et Tremble (1986) soulignent, pour leur part, que des ateliers de trois heures donnés sur les lieux de travail suffisent à influencer les attitudes des spécialistes en santé à l’égard des jeunes gais, lesbiennes et bisexuels.

Conséquences

En conséquence, nous suggérons que les responsables des politiques et les stratèges des systèmes scolaires et de santé publique s’activent à améliorer la qualité des programmes d’éducation, des services préventifs de santé et du soutien social pour les jeunes gais, lesbiennes et bisexuels.

38. Un tiers des ministères de la Santé et les deux tiers des services de santé publique affirment subventionner la formation en cours d’emploi fournie au personnel de santé publique. Plus de la moitié des infirmières et infirmiers de santé publique signalent avoir reçu une telle formation sous forme d’au moins trois ateliers sur la santé, la sexualité ou le VIH chez les jeunes. Ces personnes possèdent en moyenne 13 ans d’expérience dans leur domaine, 10 ans d’expérience de travail avec la jeunesse et 9 ans d’expérience liée à la santé sexuelle des jeunes.

Ces données indiquent que certains paliers de la santé publique offrent systématiquement à leurs infirmières et infirmiers de la formation en cours d’emploi, ce qui coïncide avec un autre critère de qualité se rapportant à la prestation des services (Association canadienne de santé publique, 1993; Scollo, 1997; American Association for Counseling and Development et al., 1990). Elles correspondent également aux résultats d’autres études sur les besoins de perfectionnement professionnel et sur la situation du personnel des services de santé affecté en milieu scolaire.

Kerr et al. (1989) soulignent, à la suite d’une enquête sur les besoins du personnel enseignant et de santé, que celui-ci requiert effectivement de la formation sur l’homosexualité et sur la façon d’aborder la question de la mort dans le cas du VIH et du sida.

Chambers et al. (1994) font état des manques et des exigences de formation en cours d’emploi chez les infirmières et infirmiers de santé publique en Ontario. Ils comparent les activités de ces personnes avec celles mentionnées dans l’énoncé des rôles mis de l’avant par l’Association canadienne de santé publique. Ils rapportent ce qui suit au sujet des infirmières et infirmiers :

  • Bon nombre dispensent des soins et des services dans le cadre de leur fonction, et s’estiment bien préparés à cet effet. Qui plus est, 70 p. 100 mentionnent jouer un rôle de gestion des maladies transmissibles et estiment que ce rôle s’accentuera dans l’avenir.
  • La plupart assument un rôle d’éducation et fournissent des conseils, et se disent bien préparés à cet égard. D’ailleurs, 81,1 p. 100 affirment donner de l’information et de la formation à des familles et à des groupes et 84,8 p. 100, aiguiller les personnes dans le besoin vers les services appropriés.
  • La majeure partie accomplissent des activités d’animation communautaire, de marketing social et de développement communautaire et s’estiment mal préparés à jouer ce rôle, même s’ils ont l’impression que ces activités augmenteront dans l’avenir.
  • Plusieurs ne s’adonnent pas du tout à l’élaboration des politiques, à la recherche, à la planification ni à la coordination. Ils se voient cependant accomplir de plus en plus souvent de telles tâches dans l’avenir, même s’ils s’estiment mal préparés à cet égard.

Ces chercheurs mentionnent par ailleurs que l’expérience des infirmières et infirmiers de santé publique ressemble à celle indiquée dans le présent rapport. Ils font état des chiffres suivants : 26,4 p. 100 possèdent moins de 5 ans d’expérience; 28,6 p. 100, entre 5 et 10 ans d’expérience; 20,4 p. 100, entre 10 et 14 ans d’expérience et 24,6 p. 100, plus de 14 ans d’expérience.

Après avoir analysé les données de la School Health Policies and Programs Study, Small et al. (1995) signalent que les infirmières et infirmiers affectés en milieu scolaire aux États-Unis ont reçu la formation en cours d’emploi suivante au cours des deux dernières années : prévention du VIH (60,6 p. 100), prévention de la grossesse (24,6 p. 100), intervention auprès des élèves ou du personnel séropositifs (33 p. 100).

Conséquences

En conséquence, nous recommandons que le secteur de la santé publique détermine, à partir des données de recherche, les compétences requises pour travailler efficacement en milieu scolaire et auprès de la jeunesse.

Soutien social

39. Environ la moitié des directions d’école signalent que les infirmières et infirmiers de santé publique aident spontanément le personnel de leur école à identifier les préoccupations de santé des élèves. Dans la plupart des cas (86,5 p. 100), on n’a pas recours à des outils standardisés ni à l’enseignement mutuel.

Les parents des groupes de discussion mentionnent qu’on devrait leur demander leur avis, ainsi que celui de leurs enfants, au sujet du contenu et de la prestation des services de santé sexuelle et des programmes d’éducation sexuelle. Tous les parents sont d’avis que le personnel de santé publique devrait jouer un rôle plus actif dans la prévention des problèmes de santé sexuelle.

Les travaux de recherche sur l’efficacité de la prestation des services préventifs en santé sexuelle laissent entendre que le personnel affecté à ces services devrait aider les élèves et les parents à évaluer leurs besoins particuliers en matière de santé (Organisation mondiale de la santé, 1997; American Association for Counseling and Development et al., 1990; Martin et al., 1996; Shea, 1991).

Small et al. (1995) rapportent que 24,3 p. 100 du personnel des services de santé ayant participé à la School Health Policies and Programs Study signalent avoir organisé des projets et des activités avec les élèves et les parents afin de promouvoir la santé.

Conséquence

En conséquence, nous suggérons qu’on encourage le personnel de santé publique à travailler plus étroitement avec les groupes d’élèves et de parents afin de cerner, de documenter et d’articuler les problèmes de santé de cette clientèle.

40. Une minorité des personnes interrogées à tous les paliers des deux systèmes affirment envoyer périodiquement des rapports aux parents concernant la sexualité. Mentionnons que 41,7 p. 100 des ministères de la Santé, 49,3 p. 100 des services de santé publique, aucun des ministères de l’Éducation, 1,4 p. 100 des arrondissements scolaires et 43,5 p. 100 des directions d’école disent le faire à intervalles réguliers. La majorité des ministères de la Santé et des services de santé publique, mais un petit nombre seulement des ministères de l’Éducation et des arrondissements scolaires, signalent inclure dans leur rapport annuel ou dans leurs communiqués de presse de l’information sur les questions de santé sexuelle.

Ces données coïncident avec les commentaires formulés par les parents des groupes de discussion. Effectivement, la plupart des parents ne s’estiment pas suffisamment renseignés par le personnel enseignant sur la nature des programmes d’éducation sexuelle ni sur celle des services de santé sexuelle offerts dans leur collectivité.

Pour bénéficier du soutien et de l’attention systématiques des parents au sujet de la sexualité, on doit leur distribuer périodiquement des rapports traitant de questions de santé sexuelle (Organisation mondiale de la santé, 1997; Center for Population Options, sans date), sans oublier de faire de même pour la population en général (Organisation mondiale de la santé, 1997).

Beazley et al. (1996) font remarquer, en rapport avec les résultats de leurs séances de discussion, que le personnel enseignant et les administrations ne se heurtent à aucun problème au moment de communiquer aux parents ce qui se passe dans les cours d’éducation sexuelle. L’examen effectué sur le processus d’instauration du programme d’éducation sexuelle en Saskatchewan (1996) montre que 41 p. 100 des parents interrogés avaient eu la possibilité de savoir ce qui se passait avec ce programme scolaire et que 30 p. 100 avaient saisi l’occasion.

L’enquête menée par Holtzman et al. (1992) auprès des arrondissements scolaires des États-Unis a fait ressortir que 42,2 p. 100 des arrondissements à l’étude fournissaient aux parents de la documentation au sujet du programme d’éducation sexuelle et sur le VIH.

Conséquences

En conséquence, nous proposons que les ministères, les arrondissements scolaires et les services de santé publique renforcent leur communication avec les parents et la population en général relativement à la santé sexuelle ainsi qu’à la prévention du VIH et des MTS.

41. Un petit nombre des personnes interrogées dans les ministères de la Santé (25 p. 100), des ministères de l’Éducation (27,3 p. 100), des arrondissements scolaires (35,9 p. 100) et des directions d’école (11 p. 100) disent encourager leur personnel à travailler avec les associations communautaires relativement aux questions de sexualité, contrairement à 65,7 p. 100 des services de santé publique. Parmi les infirmières et infirmiers de santé publique, 32,5 p. 100 affirment faire coordonner les activités liées à la santé organisées dans la collectivité avec les activités et les programmes scolaires.

Aucun des élèves des groupes de discussion n’a participé à des activités parascolaires mises de l’avant pour promouvoir la santé sexuelle. Les élèves du Québec signalent souhaiter que diverses activités de ce genre soient organisées dans leur école.

Les travaux de recherche sur l’efficacité des stratégies de soutien social se rapportant aux élèves laissent entendre qu’on doit inciter le personnel scolaire et de santé publique à travailler avec les associations communautaires (Centers for Disease Control, sans date; Dorman et Foulk, 1987; Shea, 1991).

Collins et al. (1995) font remarquer, dans leur analyse de la School Health Policies and Programs Study, que, dans 63,9 p. 100 des écoles aux États-Unis, le personnel responsable de l’éducation sexuelle met sur pied des activités et des projets de concert avec les groupes communautaires. Toujours en se basant sur l’étude américaine, Small et al. (1995) signalent qu’une proportion similaire du personnel des services de santé publique organisent des activités et des projets avec les élèves et les parents.

Conséquences

En conséquence, nous proposons d’entreprendre des recherches qualitatives qui permettraient aux stratèges de mieux comprendre comment planifier les affectations, la formation et l’appui nécessaires. Ainsi, le personnel de la santé publique pourra accomplir le rôle de développement communautaire, c’est- à-dire, travailler avec les associations œuvrant dans le domaine de la santé sexuelle.

Marketing social soutenu

42. La plupart des personnes interrogées à tous les paliers du système de santé publique ne mentionnent pas s’occuper de campagnes de marketing social ni de sensibilisation sur le VIH, les MTS ou la santé sexuelle à l’intention de la jeunesse. Par contre, 16,7 p. 100 des ministères de la Santé, 25,6 p. 100 des services de santé publique et 16,9 p. 100 des infirmières et infirmiers de santé publique mentionnent le faire à intervalles réguliers.

Les élèves des groupes de discussion souhaitent qu’on prépare à leur intention davantage de campagnes de sensibilisation sur les questions de santé sexuelle, en partie pour contrecarrer les influences néfastes des médias. Les travaux de recherche sur l’efficacité des campagnes de marketing social font ressortir l’importance d’organiser régulièrement de telles campagnes pour la jeunesse (Health Communications Unit, 1998).

Conséquences

· Il faut organiser périodiquement des campagnes de marketing social et de sensibilisation afin de susciter le soutien social envers les comportements responsables en matière de santé sexuelle et d’assurer la bonne marche des programmes de santé sexuelle destinés aux adolescentes et adolescents.

En conséquence, nous proposons que les stratèges envisagent des moyens de mettre en commun les ressources, d’aller chercher des commanditaires et de prendre les mesures nécessaires pour que se tiennent régulièrement des campagnes de marketing social et de sensibilisation, par l’entremise desquelles on encouragerait les jeunes à prendre de saines décisions quant à leur santé sexuelle.

43. Seul un petit nombre des personnes interrogées dans le secteur de la santé, soit 16,7 p. 100 des ministères de la Santé, 10,6 p. 100 des services de santé publique et 6,1 p. 100 des infirmières et infirmiers de santé publique, affirment préparer leurs campagnes de sensibilisation en fonction d’études de marché sur le segment jeunesse de l’auditoire. Moins du tiers des répondantes et répondants à tous les paliers du secteur de la santé publique signalent avoir demandé l’opinion des groupes œuvrant dans le domaine de la sexualité ou du sida au sujet de la planification de ces campagnes.

Il importe de préparer les campagnes de marketing social et de sensibilisation en fonction d’études de marché sur le segment jeunesse de l’auditoire (Mintz, 1989; Campbell et Campbell, 1990; Santé Canada, 1991). Il faudrait de surcroît obtenir les conseils des groupes œuvrant dans le domaine de la sexualité ou du sida (McCallum, 1989; Association canadienne de santé publique, 1993).

Conséquences

En conséquence, nous suggérons de poursuivre en permanence des recherches sur l’efficacité de la planification des messages sur la santé destinés aux jeunes au sujet de la santé sexuelle, le VIH/sida et les MTS. Il y aurait lieu de disséminer les résultats de ces recherches aux services de santé publique locaux et à d’autres organismes afin de les encourager à utiliser les données au moment d’organiser des campagnes de sensibilisation.

44. Une minorité des personnes interrogées dans le milieu de la santé publique signalent avoir fait coïncider leurs campagnes de sensibilisation avec les programmes scolaires ou avoir coordonné la prestation de services d’information et de conseils dans les cliniques locales. En fait, 8,3 p. 100 des ministères de la Santé, 14,5 p. 100 des services de santé publique et 10,4 p. 100 des infirmières et infirmiers de santé publique disent planifier leurs campagnes de sensibilisation et de marketing social en fonction des programmes scolaires. De plus, 25 p. 100 des ministères de la Santé, 41,9 p. 100 des services de santé publique et 34,6 p. 100 des infirmières et infirmiers de santé publique mentionnent coordonner leurs campagnes de sensibilisation avec la prestation de services d’information et de conseils. Environ le tiers du personnel enseignant et les deux tiers des infirmières et infirmiers de santé publique font savoir qu’ils utilisent le matériel de la Semaine nationale de sensibilisation au sida afin de renforcer la sensibilisation au VIH/sida. La plupart ne s’appuient que rarement sur les activités communautaires liées à la sexualité ou au VIH dans leur travail d’enseignement ou de promotion de la santé.

Les travaux de recherche sur les campagnes de marketing social laissent fortement supposer qu’on devrait coordonner celles-ci avec la prestation des services d’information et de conseils ainsi qu’avec les programmes scolaires (Mangham, 1987; Mintz, 1989). On devrait faire participer les écoles à la Semaine nationale de sensibilisation au sida de même qu’à d’autres événements spéciaux (Bernstein et Roaman, 1988; Dommeyer et al., 1995).

Conséquences

En conséquence, nous estimons qu’il y aurait lieu d’effectuer des travaux de recherche afin de dégager les pratiques et les modèles exemplaires des programmes de sensibilisation qui ont été coordonnés avec les services d’information et de conseils ainsi qu’avec les programmes scolaires.

45. Seul un petit nombre des personnes interrogées dans le secteur de la santé publique mentionnent tenir périodiquement des campagnes de sensibilisation ou rechercher l’engagement du milieu des affaires quant au VIH et à la sexualité. En effet, 8,3 p. 100 des ministères de la Santé, 4,6 p. 100 des services de santé publique et 2,7 p. 100 des infirmières et infirmiers de santé publique rapportent organiser régulièrement des campagnes de sensibilisation ou communiquer des messages qui visent à obtenir la participation des gens d’affaires. En outre, une minorité des répondantes et répondants du milieu de la santé disent inclure des messages d’opinion dans le cadre de ces campagnes. En fait, 8,3 p. 100 des ministères de la Santé, 15 p. 100 des services de santé publique et 14,9 p. 100 des infirmières et infirmiers de santé publique notent le faire.

Pour assurer l’efficacité des campagnes de marketing social, on devrait avoir recours aux médias pour faire passer des messages d’opinion (Wallack et Dorfman, 1996; McKnight, 1994) en plus de faire intervenir le milieu des affaires (Paluck et al., 1994).

Conséquences

En conséquence, nous suggérons que soient effectuées des recherches afin de faire ressortir des exemples d’engagement d’entreprises et de communiquer les résultats à grande échelle.

Milieu physique sain et empreint de sécurité

46. Dans les systèmes scolaires et de santé publique, on a énoncé clairement les précautions universelles à prendre pour prévenir l’infection au VIH et les autres maladies transmissibles. Il s’agit notamment d’utiliser des gants en caoutchouc, des désinfectants et des consignes de sécurité dans la manipulation du sang ou des aiguilles. Ceci dit, dans les trois paliers des systèmes, le secteur de la santé publique surveille rarement la conformité à ces lignes directrices. Les trois quarts des ministères de la Santé (75 p. 100) contre seulement 5,6 p. 100 des services de santé publique, 5,4 p. 100 des infirmières et infirmiers de santé publique, 9,1 p. 100 des ministères de l’Éducation, 21 p. 100 des arrondissements scolaires et 14,6 p. 100 des directions d’école signalent le faire. Qui plus est, moins du quart des arrondissements scolaires et des directions d’école disent fournir périodiquement au personnel de la formation en cours d’emploi sur ces précautions universelles.

Les travaux de recherche sur l’efficacité des politiques et des pratiques relatives au caractère sain et à la sécurité du milieu dans les écoles font ressortir l’importance de mettre en œuvre des mesures sur les précautions universelles puis d’en surveiller la conformité (Smith, 1991).

Small et al. (1995) rapportent, dans leur analyse de la School Health Policies and Programs Study, que 68,6 p. 100 des États et 75,8 p. 100 des arrondissements scolaires aux États-Unis prévoient de la formation concernant les précautions en question. Le rapport de l’étude montre en outre que 48 p. 100 des États et 55,5 p. 100 des arrondissements scolaires contrôlent le respect des lignes directrices pertinentes.

Conséquences

En conséquence, nous estimons utile de mener des études qualitatives sur les meilleures façons de gérer les lignes directrices sur les précautions universelles en milieu scolaire.

47. Seul un petit nombre des personnes interrogées à tous les paliers des deux systèmes font savoir qu’ils publient ou distribuent des rapports d’étude ou qu’ils s’efforcent d’encourager l’accessibilité des condoms pour les jeunes dans les écoles ou à proximité. En fait, 8,3 p. 100 des ministères de la Santé, 59,6 p. 100 des services de santé publique et 24,2 p. 100 des infirmières et infirmiers de santé publique disent inciter les écoles à appuyer ou à faciliter l’accès aux condoms. Par ailleurs, 9,1 p. 100 des ministères de l’Éducation, 8,7 p. 100 des arrondissements scolaires et 12,4 p. 100 des directions d’école mentionnent publier des études ou des recommandations concernant l’accès aux condoms.

Un milieu physique sain empreint de sécurité signifie que les écoles prévoient l’accès aux condoms pour la jeunesse à l’intérieur des murs de l’école ou à proximité (Laboratoire de lutte contre la maladie, 1998; Otis et Gomez, 1994; St. Onge, sans date; Otis, 1996; Guttmacher et al., 1994).

Brown et al. (1997) font remarquer, à la suite de séances de discussion tenues dans 15 établissements scolaires de Seattle, que les élèves apprécient le fait d’avoir accès à des condoms. Ils ajoutent que les élèves préfèrent se rendre dans des secteurs de l’école qui sont à l’écart des regards pour obtenir des condoms plutôt que d’utiliser des distributeurs de condoms. Dans son analyse sur les condoms et les établissements scolaires, Cloutier (1994) rapporte pour sa part que 42,2 p. 100 des écoles ne prévoient aucun accès aux condoms, 4,4 p. 100 prévoient le faire bientôt et 55,4 p. 100 facilitent cet accès par l’entremise de distributeurs de condoms, du CLSC local, d’associations étudiantes et du personnel enseignant. Small et al. (1995) signalent que des condoms sont disponibles dans 4,7 p. 100 des écoles du premier cycle du secondaire et dans 8,4 p. 100 des écoles du second cycle du secondaire, aux États-Unis.

Conséquences

En conséquence, nous suggérons de faire la synthèse des rapports d’étude sur les politiques et les procédures qui peuvent faciliter l’accès aux condoms et l’utilisation des condoms puis d’offrir ce matériel au personnel enseignant et de santé publique.

48. Les personnes interrogées aux trois paliers des systèmes scolaires disent organiser beaucoup d’activités en vue de prévenir le harcèlement sexuel dans les écoles. En effet, 18,2 p. 100 des ministères de l’Éducation, 66,7 p. 100 des arrondissements scolaires et 72,2 p. 100 des directions d’école signalent appuyer les programmes scolaires visant à prévenir le harcèlement sexuel ou en mettre en place. La plupart des répondantes et répondants du secteur de la santé publique disent ne pas souvent s’engager dans des activités de prévention du harcèlement en milieu scolaire. De plus, 75 p. 100 des ministères de la Santé mentionnent contrôler par diverses mesures les activités de prévention du harcèlement sexuel dans les écoles. Seulement 1,1 p. 100 des services de santé publique et 6,6 p. 100 des infirmières et infirmiers de santé publique mentionnent contrôler le respect des lignes directrices sur la prévention du harcèlement sexuel.

Aucun des élèves des groupes de discussion ne signale avoir participé à l’école à des activités de prévention du harcèlement sexuel. Cette constatation va à l’encontre de la nôtre.

La prévention du harcèlement sexuel s’avère essentiel au maintien d’un milieu scolaire sain empreint de sécurité (Rowe, 1987; Association canadienne de santé publique, 1993).

Conséquences

En conséquence, nous suggérons de mener des recherches afin d’évaluer le nombre de même que l’incidence des politiques, des procédures et des programmes scolaires visant la prévention du harcèlement sexuel. On devrait par ailleurs diffuser le fruit de la présente recherche aux systèmes scolaire et de santé publique.

49. La majorité des systèmes scolaires rapportent chercher à prévenir la discrimination, mais ils ne précisent pas s’ils portent une attention particulière à l’homophobie ou à l’orientation sexuelle. Ainsi, 9,1 p. 100 des ministères de l’Éducation, 49,4 p. 100 des arrondissements scolaires et 50,9 p. 100 des directions d’école signalent avoir adopté ou instauré des politiques ou des programmes visant à prévenir la discrimination. De nombreuses personnes interrogées dans le secteur de la santé publique indiquent accorder très peu d’énergie en milieu scolaire à la prévention de la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle. En outre, 1,1 p. 100 des services de santé publique et 9,1 p. 100 des infirmières et infirmiers de santé publique mentionnent surveiller le respect de leurs lignes directrices concernant la prévention de la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle.

Les expériences et les points de vue rapportés par les élèves dans les séances de discussion laissent entrevoir un sérieux problème d’homophobie en milieu scolaire. Les élèves des groupes de discussion de la Nouvelle-Écosse et du Québec donnent des exemples de situations survenues dans leur école. Les élèves du Québec ajoutent à quel point les discussions tenues à l’intérieur des murs de leur école au sujet de la sexualité ne poussent pas à aborder l’orientation sexuelle. D’autres ajoutent qu’il est même tabou d’en parler. Les élèves font observer que ni le personnel enseignant ni le matériel pédagogique des cours d’éducation sexuelle ne couvrent adéquatement la question.

La discrimination fondée sur l’orientation sexuelle à laquelle se heurtent des élèves ou des membres du personnel des écoles s’avère un facteur clé amenant les jeunes gais, lesbiennes et bisexuels à vivre une double vie. Il importe que les mesures énergiques pertinentes soient en place pour prévenir adéquatement ce genre de discrimination ou de harcèlement (Schwartz, 1994; Wright et Thompson, 1990; Martin, 1982; Sears, 1982; Feldman, 1989; Uribe and Halbeck, 1992; Santé Canada, 1996; Treadway et Yoakam, 1992; O’Connor, 1995; Ramafedi, 1990).

Martin (1982) montre comment le jeune adolescent gai apprend à cacher sa sexualité, ce qui mène à l’isolement et à la confusion par rapport à l’identité sexuelle. Feldman (1989) fait état des difficultés qui se présentent pour les jeunes gais qui effectuent leur sortie face à leur homosexualité. Ces jeunes se perçoivent comme différents des hommes gais plus vieux, ce qui veut dire qu’ils ne se voient pas nécessairement comme présentant des risques élevés par rapport au VIH. Wright et Thompson (1990) suggèrent que les directions d’école devraient tenir compte de l’homophobie, donc, élaborer et instaurer des lignes directrices afin d’éliminer ou de réduire ce genre d’attitude. L’homophobie se manifeste sous diverses formes, par exemple : la non- reconnaissance de la sexualité de cette jeune population, les actes d’omission, la non-confrontation de la situation ou le manque de délicatesse dans le langage utilisé.

Sears (1992) explique que le personnel enseignant et les responsables en orientation n’interviennent pas énergiquement afin d’appuyer les jeunes ou contrecarrer l’homophobie. L’étude de Santé Canada (1996) fait ressortir un certain nombre de problèmes possibles dans les écoles, soit : les messages sociaux dévalorisant l’homosexualité, le faible degré d’aise du personnel enseignant ainsi que la double vie du personnel ou des élèves homosexuels.

Small et al. (1995) notent, dans leur analyse de la School Health Policies and Programs Study, que 78,4 p. 100 des États américains et 59,9 p. 100 des arrondissements scolaires interdisent toute discrimination envers le personnel et les élèves séropositifs. L’étude effectuée par la Planned Parenthood (1996) auprès de 220 jeunes de la Nouvelle-Écosse fait ressortir que les jeunes gais, lesbiennes et bisexuels ne reçoivent aucun appui de leur famille, de leur école ou des organismes offrant des services de santé. Beazley et al. (1996) soulignent, en se basant sur les résultats de leurs séances de discussion tenues avec les enseignantes et enseignants de la Nouvelle-Écosse, que le personnel enseignant trouve difficile de traiter de notions liées aux activités homosexuelles. Marriey et Cain (1997) mentionnent, dans leur bref rapport préliminaire sur les enseignantes et enseignants qui travailleront éventuellement au primaire, que la moitié de ces personnes ne considèrent pas opportun d’aborder le sujet de l’homosexualité. L’étude réalisée pour le compte de l’Association canadienne de santé publique (1998) renferme des commentaires à l’effet que le milieu scolaire peut se révéler hostile envers les jeunes gais, lesbiennes et bisexuels.

Uribe et Halbeck (1992) proposent un certain nombre d’activités possibles pour atténuer l’homophobie en milieu scolaire. Ils rapportent quelques études sur le harcèlement en milieu scolaire où l’on examine la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle. Leur rapport sur le Project 110 instauré dans les écoles de Los Angeles fait état des moyens efficaces que peuvent prendre les écoles pour prévenir ou diminuer l’homophobie. Dans le rapport de l’Association canadienne de santé publique (1998), on recommande les dix mesures suivantes aux écoles pour appuyer les élèves gais, lesbiennes et bisexuels :

1. Ajouter le sujet de l’orientation sexuelle aux cours sur la santé.

2. Inclure des notions sur l’orientation sexuelle dans les cours d’éducation sexuelle.

3. Veiller à ce qu’on reconnaisse la contribution des personnes homosexuelles dans les cours de littérature et d’histoire.

4. Adapter les lignes directrices en matière d’éducation sexuelle publiées par Santé Canada de manière à inclure l’aspect de l’acceptation positive de l’homosexualité.

5. Offrir des services en orientation et des services préventifs de santé qui sont adaptés aux besoins des élèves gais, lesbiennes et bisexuels.

6. Incorporer des discussions sur l’homophobie dans les cours sur les droits de la personne.

7. Faire spécifiquement référence à l’homophobie dans les politiques sur l’antidiscrimination.

8. Fournir au personnel de l’école de la formation en cours d’emploi.

9. Prévoir des zones protégées dans les écoles.

10. Encourager l’acceptation de l’homosexualité.

Conséquences

En conséquence, nous recommandons que les systèmes scolaire et de santé publique cherchent à veiller à ce que le climat social de leurs écoles et de leurs collectivités ne soit pas homophobe et à ce que les dispositions positives envers les jeunes gais, lesbiennes et bisexuels soient encouragées. Qui plus est, nous suggérons de relier cette modification du climat social à d’autres mesures pour adapter les services de santé sexuelle et pour changer le contenu des programmes d’éducation sexuelle de manière à combler les besoins des jeunes gais, lesbiennes et bisexuels en matière de prévention du VIH et de santé sexuelle.

50. Aucun des ministères de l’Éducation n’indique suivre régulièrement les attitudes du personnel, des élèves ou des parents relativement à la sexualité et au VIH. Deux ministères signalent l’avoir fait par le passé, et trois affirment planifier de le faire dans l’avenir. Seul un petit nombre des personnes interrogées dans le secteur de la santé publique disent évaluer les politiques et les lignes directrices sur l’antidiscrimination en milieu scolaire.

Le personnel enseignant et les parents des groupes de discussion rapportent que les enseignantes et enseignants de leur école se sentent mal à l’aise avec les questions de sexualité. Les élèves signalent que les enseignantes et enseignants évitent de parler des sentiments et des émotions dans les cours d’éducation sexuelle.

Les attitudes des parents, des élèves et du personnel enseignant à l’égard de la sexualité et des sujets connexes constituent un des plus importants facteurs jouant sur le caractère sain et la sécurité se dégageant d’un milieu scolaire. On doit renforcer, encourager, appuyer les attitudes positives en plus d’en faire le suivi si on veut que les politiques et les programmes en place soient efficaces (Otis et Gomez, 1994; O’Hara et al., 1996; Bruce et al., 1990; Shamai et Coambes, 1992).

Après avoir sondé les élèves de deux universités du sud des États-Unis, Bruce et al. (1990) notent les attitudes négatives à l’égard de l’homosexualité et de l’utilisation des condoms. Ils laissent entendre qu’on devrait aborder la question dans les programmes scolaires.

MacKinnon et al. (1994) expliquent que deux types de formation en cours d’emploi (guidée ou autodirigée) peuvent influencer favorablement les croyances et les attitudes du personnel enseignant envers le VIH, le sida et la sexualité. Ce faisant, on pourra certainement modifier le climat social des écoles et des salles de classe.

Conséquences

En conséquence, nous suggérons d’entreprendre des recherches afin de permettre aux stratèges de comprendre les attitudes et les croyances se rattachant au VIH et à la sexualité chez les élèves, les parents et le personnel enseignant. Nous recommandons en outre de suivre l’apparition et l’évolution de ces attitudes et croyances à l’échelle des collectivités de manière à mettre en place ou à éliminer les programmes pertinents, au besoin. On devrait enfin offrir aux spécialistes des secteurs scolaire et de santé publique les résultats de la présente étude de même que les instruments utilisés dans le cadre de l’enquête.

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